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Nouvelles découvertes sur la déportation d’homosexuels

date de redaction jeudi 8 novembre 2007


Résultats des derniers travaux conduits par la Fondation pour la Mémoire de la Déportation (FMD) sur la déportation pour motif d’homosexualité depuis la France pendant la Seconde Guerre Mondiale.

Dans le cadre de la convention triennale (2004-2007) qui lie le Ministère de la Défense et des Anciens Combattants d’une part et la Fondation pour la Mémoire de la Déportation d’autre part, une équipe basée au Mémorial de Caen, a travaillé sur la déportation depuis la France pour motif de répression (résistants, otages, communistes, syndicalistes, militaires, homosexuels).

Les nouvelles conclusions rendues évoquent le sort de 63 victimes dont la déportation pour motif d’homosexualité (depuis la France) est désormais prouvée grâce à des éléments probants (identité des personnes ; date et lieu d’arrestation ; motif de condamnation et date du jugement ; date de remise aux forces allemandes ; date et lieu de départ en convoi ; date et nom du camp d’internement ; date de décès ou de libération ; motif de libération : décès, fin de la peine, enrôlement de force dans l’armée allemande sur le front de l’est, ou libération des camps par les forces alliées).

Si les nouvelles recherches écartent volontairement certains cas pourtant recensés dans le rapport Mercier de 2001, c’est pour s’attacher à mettre à jour des parcours complets et donc irréfutables.


Aujourd’hui il est clairement établi que même si elle était marginale (1%) la déportation depuis la France pour motif d’homosexualité est une réalité historique incontestable.

Les principaux résultats des nouvelles recherches de la FMD sur la déportation depuis la France pour motif d’homosexualité :

63 cas ont été recensés à ce jour par la FMD :

 22 sont arrêtés en Alsace-Moselle, territoires annexés au Reich

  • 12 sont internés à Natzweiler
  • 7 sont internés à Schirmeck
  • 1 est interné à Schirmeck puis à Natzweiler
  • 2 sont transférés vers des prisons du Reich

 35 sont arrêtés au sein du Reich

  • 32 sont internés dans des prisons allemandes
  • 2 sont internés à Natzweiler
  • 1 est interné à Schirmeck

 6 sont arrêtés en zones occupées (notamment Paris)

  • 5 sont transférés au sein de transports de « politiques » vers Buchenwald (certains homosexuels portaient le triangle rouge des résistants)
  • 1 est transféré dans des prisons du Reich où il est classé Paragraphe 175

 Au moins 11 trouvèrent la mort en déportation dont 9 dans un camp de concentration ou un commando extérieur.

Les autres informations livrées par ces nouvelles recherches :

 L’existence de cas de déportation pour motif d’homosexualité dans la France occupée (notamment Paris) et en dehors des territoires annexés (Moselle, Bas Rhin, Haut Rhin).

Parmi les 6 cas recensés, il y a :

  • Jean Henri T., artiste dramatique arrêté en 1944 à Paris car il entretenait une liaison avec un Allemand.
  • Un danseur d’opéra fréquentant les bals homosexuels clandestins de Paris. Arrêté le 22 août 1943 Place Blanche, il est emprisonné à Nanterre, puis remis le 1er octobre 1943 à la Brigade Mondaine de Paris qui le livre aux forces allemandes en vue de sa déportation.
  • Georges C., homosexuel âgé de 17 ans et originaire de Dreux. Arrêté à Paris en novembre 1941, il est condamné à 5 ans de prison. Interné à Fresnes, il est transféré par convoi de la Gare de l’Est en direction de Karlsruhe (Allemagne). Il meurt de tuberculose dans le camp où il fut déporté.

 L’existence de cas de déportation pour homosexualité de Français travaillant dans le cadre du Service du Travail Obligatoire (STO) en Allemagne

Au camp de Natzweiler, parmi les 215 personnes qui travaillaient dans le cadre du STO en Allemagne et qui ont été déportés au titre du Paragraphe 175 il y a :
15 Français (tous Alsaciens et Mosellans) ont été identifiés.
171 Allemands (originaires de Berlin et Cologne), 4 Polonais, 1 Autrichien, 1 Tchèque, 1 Russe, 1 Norvégien...

91 sur 215 moururent en déportation.
8 Français moururent en déportation, 4 restèrent en vie, le destin des 3 derniers reste méconnu.

 L’existence d’un Strasbourgeois déporté pour homosexualité ayant fait valoir ses droits à une pension

Après avoir été arrêté le 28 février 1942, condamné à une peine de prison le 11 mai 1942, il est emprisonné à la Maison d’arrêt de Mulhouse le 20 mai 1942. Sa trace est retrouvée au Camp de Schirmeck où les Allemands l’obligent à porter une casquette distinctive de couleur bleue.
Libéré en 1944, il garde le silence jusqu’en 1964, année où il sollicite une pension de la Commission Départementale chargée d’indemniser les victimes.
Ayant essuyé un refus, il forme un recours et saisit la Commission Nationale qui confirme le refus.
Il décide alors de saisir le Tribunal Administratif de sa ville. Il meut le 9 février 1965 à l’âge de 68 ans. N’ayant ni descendant, ni héritier, la plainte disparaît avec lui.

Les décennies qui ont suivi la fin de la Seconde Guerre Mondiale ont été marquées du sceau du tabou, du silence, de l’occultation et même de la négation de la déportation pour motif d’homosexualité.

Grâce à Pierre Seel, premier français à avoir témoigné de sa déportation pour motif d’homosexualité, grâce à l’engagement du journaliste militant Jean Le Bitoux, grâce à la persévérance des associations qui portent le souvenir de la déportation des homosexuels, et plus récemment grâce aux travaux des historiens et des universitaires, nous arrivons progressivement à faire la lumière sur cette sombre page de l’Histoire de France.

Adapté d’une compilation réalisée par Hussein Bourgi, président du Mémorial de la Déportation Homosexuelle


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