lundi 16 septembre 2013
A la suite de plusieurs déclarations ministérielles, l’Inter-LGBT s’inquiète du devenir des promesses à propos de la procréation médicalement assistée, et l’amélioration des lois sur la famille.
Communiqué de presse Inter-LGBT - Paris, le 13 septembre 2013
« Procrastination Mollement Assumée » : ces mots ne sont pas de l’Inter-LGBT, mais du rapporteur de la loi sur le mariage pour tous, Erwann Binet, sans doute très agacé - comme nos associations - par les récentes interventions des ministres Marisol Touraine et Najat Vallaud Belkacem au sujet de l’ouverture de la PMA, procréation médicalement assistée, à toutes les femmes.
Nous étions peu habitués aux interventions de Marisol Touraine, ministre de la santé, sur la PMA sauf pour rappeler qu’elle était par le passé favorable à son ouverture à toutes les femmes. De même, Najat Vallaud Belkacem nous avait habitué à soutenir l’ouverture de la PMA à toutes les femmes ceci notamment au nom du candidat François Hollande lors de la campagne présidentielle. Rappelons également que Jean-Marc Ayrault s’était engagé - au mois de Janvier dernier - à ce que la PMA fasse partie de la loi dite “famille”. Et que Dominique Bertinotti s’était également engagée à plusieurs reprises au printemps à y intégrer la PMA.
Mais voilà que, depuis une semaine, à 5 reprises sur 5 médias différents trois ministres ont justifié le fait que cette disposition ne relève pas des questions sociales et familiales mais - selon elles - des questions bioéthiques et médicales. La ministre de la famille allait même hier dans les colonnes du Monde jusqu’à conseiller aux députés socialistes de ne pas déposer d’amendement PMA lors de l’examen de son projet de loi.
L’Inter-LGBT rappelle avec insistance que l’accès à la PMA pour les couples de femmes n’est pas une disposition relevant des lois de bioéthique comme l’a très justement fait remarquer Erwann Binet à plusieurs reprises au sein de l’hémicycle durant le débat sur le mariage pour tous. L’Inter-LGBT rappelle que les questions relatives à la PMA avec tiers donneur ont été débattues lors des premières lois de bioéthique de 1994. Il a été décidé alors qu’il n’y avait pas d’opposition à ce que cette technique d’assistance médicale à la procréation soit légalisée et encadrée en France. La rupture du lien entre sexualité et procréation et l’avènement de la parenté d’engagement dans un cadre non adoptif ont donc été officiellement actés en 1994. L’ouverture de la PMA aux couples de femmes n’en est qu’un prolongement légitime qui ne remet aucunement en cause la décision prise à l’époque. En quoi serait-il moins “éthique” qu’une femme donne naissance à un enfant par le biais d’un don de sperme – dès lors qu’elle est en couple avec une femme plutôt qu’avec un homme ? En quoi le rôle et la place du donneur de sperme serait-il différent lorsque le second parent est une femme plutôt qu’un homme ? Sauf à considérer qu’un couple lesbien est moins apte à élever un enfant qu’un couple hétérosexuel, ce que toutes les études scientifiques réfutent. La loi du 17 mai 2013, en accordant l’adoption conjointe aux couples mariés de même sexe, a d’ailleurs implicitement reconnue l’égale capacité parentale des couples, quelle que soit leur orientation sexuelle.
La « loi famille » qui doit être présentée fin 2013 doit intégrer des dispositions visant à sécuriser la situation de toutes les familles dans leur diversité : familles recomposées, meilleur accompagnement des familles adoptives et des adoptés, prise en compte de la pluriparentalité, réforme de la filiation et de la médiation. Elle doit permettre de repenser la famille et de sortir d’un mensonge institutionnalisé depuis des années qui veut masquer - au sein de bien des couples hétérosexuels - l’existence d’un tiers donneur dans la création de leurs familles. Les lesbiennes qui font appel à une PMA assument, elles, leur choix et l’Etat se doit de sécuriser leurs familles. Il se doit également de leur donner en France un cadre sanitaire propice à la réalisation de leur projet parental. Il n’est plus soutenable que l’Etat continue de fermer les yeux sur celles qui vont aujourd’hui - dans des conditions psychologiques, financières et sanitaires difficiles - en Belgique ou en Espagne par exemple dans l’espoir de fonder un foyer.
Face aux renoncements successifs et à la grande frilosité du gouvernement en matière familiale et face au report de calendrier du CCNE, l’Inter-LGBT interpelle vivement les parlementaires progressistes et les invite à déposer sans attendre une proposition de loi sur l’ouverture de la PMA aux lesbiennes. La PMA a occupé une part importante des débats et des auditions du projet de loi sur le « mariage pour tous ». Plusieurs propositions de loi allant dans le sens d’un élargissement de l’accès à la PMA ont par ailleurs été déposées par le passé. Les parlementaires disposent donc de toute la matière nécessaire à une telle initiative. Les associations se tiennent à nouveau à disposition des parlementaires pour apporter leur expérience et leur expertise sur le sujet.
Nicolas Gougain, Porte parole de l’Inter-LGBT,