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La transphobie tue

date de redaction vendredi 19 novembre 2010


Les Flamands Roses participent au Transgender Day of Remembrance.


Rassemblement marché Sébastopol à Lille samedi 20 novembre 2010 à midi

Nous sommes ici aujourd’hui car le 20 novembre 2010 a lieu pour la douzième fois le « Transgender Day Of Remembrance », journée du souvenir trans, dont l’objectif est de se souvenir et de visibiliser les personnes trans assassinées.

Organisé pour la première fois pour dénoncer le meurtre de Rita Hester en 1998, cet événement est devenu international et est l’occasion de rassemblements dans de multiples pays. En France, des événements ont notamment lieu à Paris, Strasbourg...

Les personnes trans ne se reconnaissent pas dans le genre qui leur a été attribué à la naissance. Les hommes trans sont des hommes assignés à la naissance dans le genre féminin, effectuant une transition du féminin au masculin, et les femmes trans sont des femmes assignées à la naissance dans le genre masculin, effectuant une transition du masculin au féminin. Certaines personnes trans se reconnaissent aussi hors des identités "homme" et "femme". Ils et elles sont contraintes à la fois par l’Etat, la médecine et les normes sociales. Ce système de normes entraîne et légitime la violence à l’égard des personnes trans.

Les meurtres des personnes trans ne sont pas des événements isolés, mais sont révélateurs de l’omniprésence de la transphobie. Alors qu’une personne trans est assassinée tous les trois jours dans le monde, les peines obtenues par les meurtriers sont souvent légères : ainsi le 14 août 2008, au Royaume-Uni, le meurtrier présumé de Kellie Telesford était acquitté après que la défense fut parvenue à jeter le discrédit sur la victime ; le 23 août, aux États-Unis, le meurtrier d’Alexis King obtenait des circonstances atténuantes ; un an plus tôt, dans le même Etat, le meurtre d’Erica Keel, heurtée à quatre reprises par la voiture de son assassin, était considéré comme un accident, tandis qu’au Portugal en 2006 les meurtriers de Gilberta Salce avaient été condamnés à des peines légères de 11 à 13 mois.

S’il ne s’agit que d’exemples, ces jugements affirment que les personnes trans n’ont pas les mêmes droits que les autres être humains, qu’assassiner une personne parce qu’elle est trans n’est pas considéré comme un crime de haine mais comme une circonstance atténuante. La défense fait peser la culpabilité sur les victimes, prétendant qu’elles se « feraient passer pour ce qu’elles ne sont pas » et l’auraient forcément un peu cherché. La majorité des médias va également dans ce sens, s’acharnant à utiliser les prénoms et le genre assignés à la naissance pour parler des personnes trans, légitimant ainsi la défense des meurtriers.

Mais le vecteur principal de transphobie vient encore des Etats eux-mêmes, qui, en plus de ne pas reconnaître la transphobie comme une discrimination, rendent généralement extrêmement difficile le changement d’état-civil, requérant la stérilisation pour changer la mention du sexe. En plus de mettre des bâtons dans les roues des personnes trans, ce refus de changer l’état-civil peut avoir des conséquences catastrophiques, en risquant de les « outer » dans un milieu transphobe ; un autre exemple dramatique où l’Etat est directement complice des violences transphobes est la situation dans les prisons, où les trans sont placé·e·s quasi-systématiquement en isolement, et où les femmes trans sont enfermées avec des hommes, devenant des cibles privilégiées d’humiliations, de violences et de viols.

La prétendue « dépsychiatrisation » des trans clamée par le gouvernement n’est qu’un effet d’annonce : seul le nom de catégories de remboursement ALD change, et non pas l’obligation d’être « diagnostiqué » par un psychiatre pour avoir accès aux hormones et aux opérations, tandis que les trans subissent également des discriminations dans les accès aux soins. De plus, le non-remboursement de certains actes liés à la transition, ainsi que les discriminations à l’embauche ou encore dans l’accès au logement exposent particulièrement les trans à la précarité. Ainsi, un nombre important de femmes trans ont recours à la prostitution, et sont par conséquent encore plus exposées aux risques de violence.

Les violences spécifiques aux personnes trans ne concernent pas qu’eux et elles : donner des circonstances atténuantes à un meurtrier parce que sa victime l’a « trompé » sur son « vrai sexe » ou parce qu’elle avait « une force d’homme » lui permettant de se défendre, c’est aussi légitimer les argumentations patriarcales rendant responsables les victimes de violences et de viols ; permettre à des psychiatres de donner ou pas leur feu vert en fonction de l’« adéquation » au genre désiré, c’est légitimer les normes de genre pour tout le monde ; refuser aux trans l’accès à des traitements hormonaux ou chirurgicaux, ou au contraire leur en imposer pour obtenir un changement d’état-civil, c’est attaquer le droit de tou-te-s à disposer de son corps.

La haine des trans ne naît pas de rien ; elle est le fruit du système patriarcal qui impose à tout le monde, en fonction d’un détail anatomique, un genre rigide qui doit déterminer toute notre vie : rose ou bleu, jupe ou pantalon, attirée par les hommes ou attiré par les femmes, opprimée ou privilégié. La lutte pour la libération des trans, comme celle des homosexuel-le-s ou des intersexes, n’est par conséquent pas dissociable du combat féministe et doit être pleinement prise en compte dans le combat pour un monde sans oppressions

Nous exigeons :

  • la dépsychiatrisation des trans, sans expertEs censéEs séparer les vraiEs trans du reste de la population ;
  • Arrêt des traitements imposés aux intersexes, accès libre et remboursé aux actes liés à la transition, contraception et avortement libres, gratuits et accessibles ; l’arrêt des pressions exercées par la médecine et l’Etat pour imposer la chirurgie génitale ;
  • l’accès à une véritable information sur les traitements, pour permettre aux trans d’être acteurICE de leur suivi médical ;
  • la dissolution des équipes officielles et le libre choix des médecins ;
  • la prise en charge des soins par la Sécurité Sociale ;
  • la reconnaissance officielle et légale de la transphobie et la mise en place de réelles campagnes de prévention contre les discriminations sexistes et LGBTIphobes ;
  • la suppression de la mention du sexe à l’état-civil et le droit pour chacunE de modifier son identité légale s’il ou elle le désire.
Rassemblement marché Sébastopol à Lille samedi 20 novembre 2010 à midi

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