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Les députés tirent le bilan de deux ans de PaCS

date de redaction mardi 20 novembre 2001     auteur Jean-Benoît RICHARD


Patrick Bloche et Jean-Pierre Michel font le bilan de l’application du nouveau dispositif, et proposent de multiples améliorations.


A quelques jours du deuxième anniversaire de la loi instituant le pacte civil de solidarité, ses auteurs, les députés Patrick Bloche et Jean-Pierre Michel, ont présenté à leurs collègues de la Commission des lois et de la Commission des affaires culturelles, familiales et sociales, un premier bilan très positif de l’application de ce nouveau dispositif. Les deux députés proposent toutefois quelques corrections pour l’améliorer et tracent des perspectives pour faire évoluer le droit, notamment sur la question de l’homoparentalité et sur le besoin de mettre en place des dispositifs de lutte contre l’homophobie.

Un bilan favorable

Se basant sur des statistiques très précises fournies par la Chancellerie, Jean-Pierre Michel et Patrick Bloche affirment que leur loi est une réussite dans les faits. En deux ans, 43 970 PaCS ont été conclus dans l’hexagone, annoncent-ils. Après un pic dû à la nouveauté, le rythme des unions a atteint un niveau très stable.

La répartition géographique des PaCS montre qu’il n’est pas un phénomène strictement urbain ; des pactes civils de solidarité sont conclus dans toutes les régions françaises. En dehors de Paris, les zones où l’on se pacse le plus sont, par ordre décroissant, Rennes, Aix-en-Provence, Versailles et Douai.

En raison des limites imposées par la Commission nationale informatique et liberté aux traitements des statistiques sur le PaCS, il est impossible de déterminer la proportion des couples hétérosexuels et homosexuels. Toutefois, au regard des expériences européennes, il semblerait que 60% des couples pacsés soient des couples hétéros.

Mais la loi sur le PaCS représente beaucoup plus qu’une simple attribution de droits. Pour la première fois au Parlement fut clairement évoquée la question de l’homosexualité. Malgré les déchaînements qu’il provoqua, Patrick Bloche et Jean-Pierre Michel considèrent que « le PaCS a incontestablement permis de banaliser l’homosexualité en l’intégrant dans un lien social clairement reconnu par le Code civil ». Conséquence de cette reconnaissance, de nouveaux projets de loi prennent en compte l’homosexualité en rajoutant des mesures de protection en raison des moeurs. Cependant, ils reconnaissant que beaucoup reste à faire.

Des aménagements nécessaires

Le Pacte Civil de Solidarité n’est pas exempt de défauts. Jean-Pierre Michel et Patrick Bloche, qui ont auditionné de nombreux usagers du PaCS pour réaliser ce rapport proposent plusieurs aménagements afin de corriger les imperfections.

Le grand domaine où tout le monde attend des améliorations, c’est en matière de fiscalité. La loi relative au pacte civil de solidarité a prévu une imposition commune au bout de trois ans. « Ce délai est trop long » reconnaissent Patrick Bloche et Jean-Pierre Michel, d’autant que les prestations sociales attribuées sous condition de ressources à l’un ou l’autre pacsé tiennent compte, dès la première année, des revenus des deux membres du couple. Ils ont déjà déposé des amendements visant à réduire ce délai, qui ont été repoussés par le Gouvernement qui souhaite avoir un peu plus de recul. Les deux députés reviennent encore à la charge en souhaitant « une révision du dispositif en vigueur qui soit plus rapide ».

La conclusion d’un PaCS permet aux étrangers de bénéficier, dans certaines conditions, d’un visa de séjour « vie privée et familiale ». Malheureusement, les associations auditionnées ont fait part de leur sentiment d’arbitraire dans la délivrance des titres de séjour. Elles ont également souligné que le délais de trois ans requis pour qu’un étranger en situation irrégulière engagé par un pacte puisse être régularisé était trop long, et place parfois les gens en situation irrégulière. Aussi, les deux élus proposent que « compte tenu de l’absence de fraudes massives constatées par les services du ministère de l’intérieur et eu égard au faible nombre de demandes de titres de séjour déposées dans les préfectures à la suite de la conclusion d’un PaCS, un assouplissement des délais [soit] rapidement mis en oeuvre ».

Pour résorber partiellement le surcroît de travail engendré par le PaCS dans les greffes des tribunaux d’instance, qui sont chargés d’enregistrer les pactes civils de solidarité, Patrick Bloche et Jean-Pierre Michel proposent que la conclusion ou la cessation d’un PaCS soit mentionnée en marge des registres de l’état civil. Toutefois, pour protéger la vie privée, il ne serait fait mention que du lieu de signature et de la date de prise d’effet du PaCS ou de la rupture. Ainsi, une simple copie ou un extrait d’acte d’état civil servirait de justificatif.

Enfin, les deux députés aimeraient que les administrations ou entreprises publiques donnent un peu mieux l’exemple au secteur privé en matière d’application du PaCS. S’ils saluent Air France ou la ville de Paris pour leur action, ils n’hésitent pas à montrer du doigt le ministère des affaires étrangères qui s’est « illustré par sa mauvaise volonté vis à vis de ses agents signataires d’un PaCS ».

Perspectives

Grâce au pacte civil de solidarité, les couples homosexuels bénéficient désormais d’un statut. Pour autant, la loi est loin de régler toutes les questions qui découlent de la vie commune, même si en la matière, la jurisprudence commence à proposer des solutions. Estimant que la légitimité des juges ne saurait prévaloir celle des représentants de la Nation, Patrick Bloche et Jean-Pierre Michel pointent les sujets qui vont devoir rapidement trouver des réponses, et esquissent des propositions.

La première interrogation concerne l’homoparentalité. Sous ce vaste sujet, les rapporteurs distinguent d’abord le besoin de créer un statut de « beau-parent ». Pour y répondre, Jean-Pierre Michel a déposé au mois de septembre une proposition de loi visant a autoriser le partenaire d’un PaCS d’adopter l’enfant de son compagnon ou de sa compagne lorsqu’il y a filiation unique, ou lorsque l’autre parent est décédé ou encore totalement déchu de son autorité parentale.

Mais tôt ou tard, notre société devra se pencher sur la possibilité d’autoriser les couples homosexuels à adopter. Pour répondre sereinement à cette question de fond qui a déjà déclenché les passions, Patrick Bloche et Jean-Pierre Michel estiment qu’il faudra préalablement dépouiller le débat de son contexte homophobe, et donc améliorer les instruments de la lutte contre l’homophobie. Une proposition de loi pénalisant la discrimination en raison des moeurs a été déposée par Patrick Bloche. Elle autoriserait les associations homosexuelles à porter plaine.

Ces bonnes intentions sont louables, encore faut-il une majorité pour faire évoluer le droit. Nonobstant l’engagement de Patrick Bloche et Jean-Pierre Michel, la gauche plurielle a choisi de temporiser.

Plus d'informations :

consultez notre dossier sur le pacte civil de solidarité, où est archivé le texte complet du rapport des députés Bloche et Michel

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