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HALDE : quatre occasions manquées et des promesses en berne

date de redaction vendredi 8 octobre 2004


L’Inter-LGBT regrette que la discussion du projet de loi sur la HALDE n’ait pas été l’occasion de proposer un dispositif ambitieux d’assistance aux victimes, ni d’une modernisation de notre droit en matière de lutte contre les discriminations. Les associations ont été au contraire caricaturées dans leur action, et la loi introduit une nouvelle hiérarchie dans le traitement des discriminations, en ne réservant l’aménagement de la charge de la preuve qu’aux discriminations racistes. Enfin, L’Inter-LGBT constate qu’aucune des promesses qui lui ont été faites cet été n’ont trouvé aujourd’hui concrétisation (débat public sur le mariage, loi sur les propos discriminatoires).


communiqué Inter-LGBT - 6 octobre 2004

Le projet de loi sur la Haute autorité indépendante contre les discriminations et pour l’égalité a été votée en première lecture à l’Assemblée nationale. L’Inter-LGBT regrette que, malgré des amendements qui auraient pu améliorer le texte, le projet n’ait pas été l’occasion d’affirmer une volonté du gouvernement de prendre au sérieux la lutte contre toutes les discriminations. Quatre occasions auront été manquées de faire de ce projet de loi le fer de lance de la lutte contre les discriminations voulu par le président de la République.

1/ Une mission d’assistance aux victimes incertaine
Alors que le gouvernement affirme que la Haute autorité donnera à la victime qui la saisira les moyens d’un choix entre une action en contentieux et celle d’une médiation, la loi fait la part belle à la seconde option, en omettant d’évoquer la première. Les amendements de clarification des missions de la Haute autorité ont tous été repoussés. Pourtant, les victimes de discriminations ont besoin d’une assistance que les associations aux moyens forcément limités ne peuvent fournir seules, pour se défendre par exemple contre un employeur raciste, un bailleur homophobe, avec lesquels la conciliation est rarement envisageable (la discrimination n’est jamais le fait d’un "malentendu"). Or, la médiation risque de devenir une solution systématiquement proposée par la Haute autorité, et non une simple alternative.

2/ L’action des associations non reconnue, et caricaturée
Relégué dans une commission consultative, le monde associatif ne se voit pas reconnu comme acteur au coeur du dispositif de la Haute autorité. Par ailleurs la saisine directe par toute victime de la Haute autorité, louable en soi, exclue les associations et les syndicats comme intermédiaire pour les cas où les victimes ont besoin d’être assistées pour entreprendre une démarche. Au contraire, Pascal Clément, rapporteur de la Commission des lois, a craint que les associations, dans leur logique forcément militante et irresponsable, ne poussent les victimes à entrer en conflit avec leur employeur, y compris quand ce n’est pas dans leur intérêt. Si le rapporteur avaient pris la peine d’auditionner les associations concernées, il n’aurait pas cédé à cette caricature de l’action associative qui ne correspond pas aux réalités.

3/ Une occasion manquée d’élargir le champ des discriminations légalement reconnues
Des amendements proposant de mettre à jour l’ensemble des textes qui luttent contre les discriminations pour y inclure la protection des personnes transsexuelles et transgenre ont également été repoussés. Aucun argument de fond n’a été opposé. L’Inter-LGBT note cependant que le président de la Commission des lois a laissé entendre que la discussion pourrait être ouverte à l’occasion de l’examen du projet de loi sur les propos homophobes et sexistes.

4/ L’introduction d’une nouvelle hiérarchie entre les discriminations, par une transposition a minima des directives européennes
Sans donner la moindre explication, le gouvernement et la majorité ont repoussé des amendements qui visaient à étendre l’aménagement de la charge de la preuve à d’autres discriminations que celles fondées sur la race, l’origine ou la religion. Les victimes de discriminations sexistes ou homophobes par exemple auront des moyens juridiques inférieurs pour se défendre devant un tribunal. Hiérarchiser ainsi les discriminations, et tenter de diviser les acteurs associatifs est inacceptable !

La secrétaire d’État à l’Intégration et à l’Égalité des chances n’a rassuré personne quand, pour répondre à chaque amendement qui proposait d’améliorer le droit contre les discriminations, elle a évoqué la possibilité pour la Haute autorité de faire des propositions au législateur. S’il faut attendre le premier rapport annuel de la Haute autorité, fin 2005 ou début 2006, pour que des propositions soient suggérées au parlement, autant dire que d’ici la fin de la législature, la lutte contre les discriminations ne fera plus l’objet d’amélioration législative. Sans attendre d’avoir été créée, la Haute autorité se substitue déjà à l’action des pouvoirs publics, ce que craignaient unanimement les associations de lutte contre les discriminations.

Pendant ce temps, les promesses de cet été n’ont toujours pas vu concrétisation :

  • Annoncé pour juin, puis pour juillet, puis pour octobre, et enfin pour novembre, le projet de loi sur les propos homophobes et sexistes n’est toujours pas à l’ordre du jour de l’Assemblée Nationale. Il serait aujourd’hui question du mois de décembre. Pour combien de temps ?
  • La commission de débat public sur le mariage, promise à plusieurs reprises en juin et juillet, n’a donné lieu à aucune annonce concrète. Au bout deux ans et demi de gouvernement, ce "débat national" voulu par le président de la République semble hors de portée, quand le gouvernement espagnol, au 6e mois de son action, met déjà en oeuvre ses promesses.
  • La circulaire du ministère de l’Intérieur pour clarifier la situation des couples pacsés binationaux n’est toujours pas publiée, alors qu’elle avait été promise pour le mois d’août.

Les précédents remaniements gouvernementaux ont été systématiquement le prétexte à de nouveaux retards pour tous ces dossiers. L’Inter-LGBT ne cache pas sa très grande inquiétude, en cette période incertaine. Elle demande au gouvernement de tenir sans attendre ses engagements

Alain Piriou, porte-parole


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