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Sensibilisation sociale
Selon les pays, les dispositions légales sur l'homosexualité varient
énormément. Au niveau européen, existent déjà des résolutions que chaque
état devrait faire siennes (rapport Roth).Pourtant, subsistent encore de
nombreux problèmes de discriminations, variant des petites tracasseries
aux crimes homophobes, et dont la fréquence est en Europe presque
indépendante des dispositions légales. C'est donc aujourd'hui sur les
pratiques qu'un effort important doit être fourni, et les pratiques ne
peuvent être modifiées que par un effort de sensibilisation de
l'ensemble de la société à la question homosexuelle. Cette action doit
s'articuler autour de deux axes majeurs : l'éducation des jeunes, et la
sensibilisation du monde des adultes. Nous proposons que les leviers de
ces actions passent par le système éducatif pour la première, et par le
monde socio-professionnel pour la deuxième.
Éduquons les jeunes !
Le système éducatif, parce qu'il joue un rôle prééminent dans la vie
quotidienne des jeunes, doit être un lieu où chacun peut exister. Dans
l'ensemble des pays européens, l'éducation est obligatoire.Elle passe de
façon quasiment systématique par de nombreuses années « à l'école ». Ce
temps de première socialisation correspond aussi à celui de la maturation
physique et affective.Il est donc tout à fait crucial de porter une
attention particulière sur les problèmes qui ne manquent pas de surgir lors
de cette maturation. De plus, l'école ne doit pas se substituer à
l'éducation des parents. Chaque famille a son histoire et ses valeurs, et
celles-ci sont transmises aux enfants selon les choix des parents. Les
problèmes contre lesquels le système éducatif doit mener une action sont
donc ceux qui touchent particulièrement à la vie en commun, donc aux grands
principes de la société ; les notions de solidarité et de tolérance en
sont.
Encore aujourd'hui, il est fréquent que le jeune qui découvre son
homosexualité soit, à des degrés divers, déconsidéré par ses professeurs,
maltraité par ses pairs, voire rejeté.Plus encore, le jeune qui se découvre
homosexuel a peur de se dire homosexuel parce qu'il ressent ce rejet, parce
qu'il a souvent reçu des messages homophobes. Face à une intolérance
parfois simplement passive et reprise pour son propre compte, il ne lui est
pas possible de vivre sa maturation affective sereinement. Le rôle du
système éducatif dans la construction des solidarités et de la tolérance
n'est alors plus assuré.
En outre, par son rôle de formation, le système éducatif doit donner aux
jeunes un accès complet et sans censure à la culture. Il doit fournir une
information culturelle claire, fidèle, précise, et sans fausse pudeur.
Hors du système éducatif traditionnel, les interlocuteurs des jeunes sont
légion à côté du corps enseignant : parents, éducateurs sportifs ou
artistiques, animateurs de quartier, responsables associatifs, syndicats
étudiants, infirmières scolaires, pédiatres, religieux, éducateurs, ou tout
agent du loisir et du temps libreŠ On pensera également à la presse
jeune.Tous ces acteurs sont confrontés aux jeunes en situation de
maturation affective.Les mêmes problèmes se posent donc et la même
responsabilité doit être assumée.
Le quotidien d'un jeune qui se découvre homosexuel tourne vite à l'enfer
s'il apprend à se nier alors qu'il est encore en train de se construire. Ce
type d'expérience est très courant.Il appelle :
- une information dépassionnée sur les sexualités, diffusée auprès de tous
les jeunes, et parlant du désir et du plaisir sans se limiter à une
information biologique ;
- le développement de programmes d'écoute et d'aide pour les jeunes en
questionnement sexuel, ce qui passe notamment par la mise en place de
lignes d'écoute, la programmation d'interventions d'information sur les
sexualités dans les lycées, l'ouverture de permanences d'accueil dans les
facultés ;
- un soutien actif aux associations de jeunes homosexuels qui permettent
une socialisation précoce au sein d'un groupe de pairs.Ce soutien doit se
concrétiser par le subventionnement pluri-annuel des associations de jeunes
gais et lesbiennes par le Ministère de la Jeunesse et des Sports au niveau
national, et les départements Jeunesse et Sports des mairies au niveau
local.
L'EuroPride d'aujourd'hui rassemble les gais et lesbiennes autour de la
citoyenneté européenne.Elle ne saurait tolérer une situation où persistent
le rejet, l'ignorance, et la haine.
Éduquons la société !
Une action dirigée seulement vers les jeunes homosexuels trouverait sa
portée limitée du simple fait que l'intolérance et la désolidarisation
viennent aussi de l'entourage, de la société. Afin d'éviter la dégradation
du tissu social, les moyens de la solidarité et de la tolérance doivent
être fournis à l'ensemble de la société, et d'abord à l'entourage direct
des jeunes. C'est précisément dans les lycées, les facultés, les centres de
loisir, les média pour jeunesque l'effort doit être le plus important. Il
se concrétisera notamment par :
- des campagnes nationales d'information sur les sexualités permettant de
dépassionner le rapport au sexe ;
- l'abrogation de toutes dispositions légales plaçant les homosexuels dans
une situation différente de celle des hétérosexuels.
- un soutien conséquent aux associations homosexuelles, aux centres gais et
lesbiens, aux maisons des homosexualités.
Le support de ces campagnes devra être le plus large possible : journaux,
télévisions, panneaux publicitaires, brochures, etc. La communication devra
être étayée par une réelle volonté politique, soulignant que la société
européenne ne saurait accepter que se développe en son sein une citoyenneté
de seconde classe pour telle ou telle catégorie de ses membres.
Une information sur les sexualités doit être mise à la disposition des
parents et des futurs parents (diffusée par exemple par les gynécologues et
les pédiatres), afin qu'ils puissent réagir sans drame lorsqu'ils ont à
appréhender la sexualité de leur enfant, notamment l'homosexualité.
Par ailleurs, le monde du travail représente, par l'astreinte humaine et
horaire qu'il implique, un cadre de contraintes souvent difficiles à
gérer.Une réflexion doit donc associer les partenaires sociaux (patronat,
syndicats), les intervenants (inspecteurs du travail, assistantes sociales,
médecins du travail), et les associations afin que les différentes
législations, notamment anti-discriminatoires soient scrupuleusement
respectées. On pense en particulier au harcèlement, à l'avancement, aux
licenciements abusifs, aux conditions d'embauche, aux relations entre
collègues et avec la hiérarchie.Enfin, les syndicats devraient s'astreindre
à défendre l'égalité de droit pour les couples et les familles
homosexuelles.
Les sociétés du monde européen servent souvent d'exemple de progrès social.
Il reste pourtant trop de discriminations, dans les lois ou les pratiques,
qui obèrent l'épanouissement des personnes homosexuelles dans ces
sociétés.Des exemples - encore trop rares (Lambda à Berlin) - ont montré
qu'il était possible de sensibiliser les individus sur la question
homosexuelle, et ainsi de faire reculer les comportements irrationnels de
peurs ou de rejets. Cette sensibilisation doit s'articuler autour de deux
axes : pour les jeunes, un éveil à la tolérance et à l'acceptation ainsi
que la diffusion d'une information complète et dépassionnée sur les
sexualités ; et pour l'ensemble de la population, la mise à disposition des
informations sur l'homosexualité dont ils peuvent avoir besoin en tant que
parents, éducateurs ou simplement en tant qu'adultes.
Au niveau national, chaque état devrait se doter d'une législation
antidiscriminatoire. Ces dispositions légales ne doivent pas rester à
l'état de principes mais ouvrir sur une situation effective de non
discrimination.