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L'utilisation moins fréquente du preservatif avec le partenaire stable

L'utilisation moins fréquente du préservatif avec le partenaire stable

Après cet état de la prévention avec les partenaires occasionnels, nous étudierons les enjeux de la prévention au sein des couples gays : le premier consiste en l'évitement de la contamination par un partenaire stable dont le statut sérologique serait inconnu ou différent ; le second tient au fait que les prises de risque avec des partenaires extérieurs au couple peuvent conduire à une transmission du VIH entre partenaires stables .

Nous détaillerons les précautions prises lors de la fellation et de la pénétration en utilisant les divers indicateurs disponibles dans le questionnaire et en tenant compte du statut sérologique des répondants et de leur partenaire stable18.

  • Stabilité des expositions au sperme lors de la fellation

Prenons d'abord le cas de la fellation et de la gestion des risques lors de cette pratique (voir le tableau n°7 A). Comme nous l'avons vu précédemment, une très faible minorité de répondants (3%) gèrent le risque (ou échappent d'emblée au problème de la transmission du VIH) en ne pratiquant pas la fellation. L'usage systématique du préservatif avec le partenaire stable s'avère très peu fréquent : en effet, seuls 3% des répondants déclarent l'utiliser " toujours ". En conséquence, le taux de répondants qui déclarent des fellations " occasionnellement ou jamais " protégées est en progression puisqu'il est passé de 91,5% en 1997 à 94% en 2000 [94% également en taux standardisé]. En 2000, le taux de déclaration de fellations " occasionnellement ou jamais " protégées varie significativement suivant le statut sérologique des couples : il culmine à 96% dans les couples séroconcordants négatifs, se situe à un niveau légèrement inférieur dans les couples séroconcordants positifs (94% ) et dans les couples où au moins un des deux partenaires n'est pas testé (93%). Bien qu'il reste important, le taux correspondant est nettement inférieur dans les couples sérodifférents (83,5%).

Tableau 7 A et B - Comportements préventifs avec le partenaire stable (sur 12 mois)

Si, pour la fellation, la protection se fait moins fréquente entre 1997 et 2000, les déclarations d'exposition au sperme lors de la fellation restent stables : le taux de répondants ayant reçu le sperme de leur partenaire stable dans la bouche et celui de ceux qui ont éjaculé dans la bouche de leur partenaire se situent autour de 40%.

Ces niveaux d'expositions continuent de varier selon le statut sérologique des couples et l'existence ou non d'un risque de transmission du VIH. En 2000, dans les couples séroconcordants négatifs, le taux d'exposition au sperme lors de la fellation est d'environ 50% ; de près de 30% dans les couples où au moins l'un des deux partenaires n'est pas testé et enfin de près du quart dans les couples séroconcordants positifs. Dans les couples sérodifférents, on estime à environ 10% le taux de répondants séronégatifs ayant reçu le sperme de leur partenaire stable séropositif dans la bouche. En revanche, 38% des répondants séropositifs déclarent avoir reçu le sperme de leur partenaire séronégatif dans la bouche.

  • Accentuation de la fréquence des rapports non protégés dans certains couples

Pour étudier les pratiques de protection lors de la pénétration anale, nous utiliserons à nouveau deux indicateurs différents : les déclarations sur la fréquence de l'utilisation du préservatif (toujours, parfois, jamais) dans les couples et, par ailleurs, celles portant sur le nombre brut de pénétrations non protégées dans l'année.

On commencera par étudier la fréquence de l'usage du préservatif pour la pénétration (cf. le tableau n°7 B précédant). Parmi les hommes ayant déclaré un partenaire stable au cours des douze derniers mois, un sur dix (10%) gère le risque (ou échappe d'emblée au problème de la transmission du VIH) en ne pratiquant pas la pénétration anale (ni active, ni passive). Un peu moins de quatre répondants sur dix (38%) déclarent utiliser " systématiquement " le préservatif. Donc, un peu plus de la moitié des répondants (51% en taux 2000 observé et standardisé) a eu des pénétrations " occasionnellement ou jamais protégées " avec leur partenaire stable au cours des douze derniers mois. Par rapport à l'enquête 1997, où ce dernier taux était de 48%, on note une diminution de la protection dans les couples alors que l'information sur le statut sérologique n'est pas mieux connue ou partagée. 

Les réponses données sur le nombre de pénétrations anales non protégées permettent d'affiner l'analyse. Cette fois c'est un peu plus de la moitié (54% en taux observé) des répondants ayant eu un partenaire stable qui, en 2000, déclarent avoir eu " au moins une pénétration anale non protégée " avec lui dans l'année. Ces pratiques varient avec l'âge (elles sont les plus importantes chez les 25-29 ans, c'est-à-dire dans la période où la vie des gays est la plus centrée sur le couple fidèle) ; plus fréquentes en province qu'à Paris (57% contre 50%) et d'autant plus fréquentes que les couples sont fidèles (71% chez les hommes qui n'ont eu qu'un partenaire dans l'année – i.e. leur partenaire stable – contre 45% chez les hommes qui en ont eu plus de cinquante). Des variations existent également selon le statut sérologique des couples. Le taux de répondants qui indiquent des rapports non protégés avec leur partenaire stable est d'environ quatre sur dix (44%) dans les couples où l'un au moins des partenaires n'est pas testé ; de la moitié environ (53%) dans les couples séroconcordants positifs ; de presque sept sur dix (67%) dans les couples séroconcordants négatifs et d'un quart (26%) dans les couples sérodifférents.

Entre 1997 et 2000 (tableau n°8), bien que l'évolution ne soit pas significative d'un point de vue statistique, il faut relever une augmentation du taux de déclaration " d'au moins une pénétration anale non protégée dans l'année " dans les couples où au moins l'un des deux partenaires est non testé (de 43% à 44%) et dans les couples séroconcordants positifs (de 49,5% à 53%). En revanche, la hausse est plus nette dans les couples sérodifférents (de 23% à 26%) et s'avère prononcée dans les couples séroconcordants négatifs (de 63% à 67%). On verra ultérieurement que des évolutions plus qualitatives sont également intervenues dans ces deux derniers types de couples : parmi les répondants ayant eu un ou des rapports non protégés, la fréquence de ces rapports semble en effet s'être accentuée.

Tableau 8 - Taux de répondants déclarant au moins une pénétration anale sans préservatif
avec le partenaire stable (sur 12 mois) selon le statut sérologique des couples

Les données précédentes appellent plusieurs commentaires sur la nature des risques pris selon les différentes situations. On voit d'abord qu'une proportion non négligeable de gays s'exposent encore au risque dans le cadre de leur couple en pratiquant la pénétration non protégée alors même que les statuts sérologiques n'ont pas été vérifiés. Par ailleurs, la moitié des couples séroconcordants positifs ne semble pas prendre au sérieux le risque de sur-contamination.

Dans les couples sérodifférents (voir le tableau n°9), le risque de contamination du partenaire négatif est clairement présent si des rapports non protégés surviennent ; le phénomène notable tient à une accentuation de la périodicité des rapports non protégés. Dans ces couples, on observe, entre 1997 et 2000, une légère diminution de la part de répondants ne déclarant aucun risque (de 77% à 74,5%) et de ceux qui ont pris des risques épisodiques (i.e., la proportion de répondants déclarant de un à onze rapports anaux non protégés dans l'année est passée de 15% à 13%). Le phénomène notable tient cependant à l'augmentation importante (de 8% à 13%) de la part des répondants ayant eu des rapports non protégés réguliers avec leur partenaire sérodifférent (la catégorie " régulier " du tableau n°9 regroupant ici les gays ayant déclaré avoir des rapports non protégés soit " une fois par mois ", soit " une fois par semaine ou plus "). L'accentuation de ces prises de risque dans les couples sérodifférents constitue une priorité pour la prévention même s'il est probable que l'amélioration de la situation ne passe pas simplement par des actions de communication mais par le renforcement du " counselling " auprès de ces couples.

Tableau 9 - Fréquence des pénétrations anales sans préservatif
dans les couples sérodifférents (sur 12 mois)

Dans les couples séroconcordants négatifs, on observe également une accentuation de la fréquence des rapports non protégés (cf. tableau n°10) : la part des rapports non protégés réguliers est passée de 40% en 1997 à 48% en 2000 [et même 50% en taux standardisé]. Les conséquences possibles du moindre usage du préservatif dans les couples séronégatifs doivent être considérées. Parmi les répondants en couples séroconcordants négatifs au moment de l'enquête qui ont eu des rapports non protégés avec leur partenaire stable dans l'année, la moitié ont eu des partenaires extérieurs dans l'année. Qu'ils soient fidèles ou non, la plupart des couples se sont mis d'accord sur l'attitude à adopter pour éviter le risque avec les partenaires occasionnels. Parmi les stratégies adoptées, on compte la fidélité (citée par 31% des répondants), l'abandon de la pénétration (7%) et surtout l'utilisation systématique du préservatif avec les partenaires occasionnels (62%). Une question permettait d'évaluer l'efficacité de cet accord. Parmi les gays qui s'étaient engagés à être fidèles, 3% ont eu des pénétrations non protégées avec des partenaires occasionnels. Le taux est de 7% parmi les hommes qui s'étaient engagés à ne pas pratiquer la pénétration anale avec leurs partenaires occasionnels et de 9% parmi ceux qui s'étaient engagés à utiliser systématiquement le préservatif avec ces partenaires. Parmi l'ensemble de ces hommes qui, en dépit de leur accord, ont pris des risques avec un partenaire occasionnel, seuls 52% se sont fait tester depuis et seuls 39% déclarent en avoir parlé à leur partenaire stable.

Tableau 9 - Fréquence des pénétrations anales sans préservatif
dans les couples séronégtatifs (sur 12 mois)

Ainsi, même si l'accord entre partenaires stables au sujet des précautions à prendre avec les partenaires occasionnels favorise la prévention (Kippax et al., 1997 ; Adam, 1997 (b) ; Adam et al., 1999 (b)), son efficacité n'est pas totale. Dans le contexte actuel d'augmentation des prises de risque avec les partenaires occasionnels, il pourrait donc être nécessaire de sensibiliser les couples qui n'utilisent pas de protection alors même que l'un ou l'autre des partenaires stables pratique la pénétration, de façon parfois fréquente, avec des partenaires extérieurs.

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