L'université euroméditerranéenne
des homosexualités

Marseille mercredi 25 juillet 2001

Ce mercredi, l'université d'été quitte le campus de Luminy pour s'installer au Palais des Congrès de Marseille, s'ouvrant ainsi au grand public, à l'occasion d'un colloque intitulé « Jeunes, homosexualités, santé, éducation » soutenu par le ministère de la Santé et de la Solidarité, celui de la Jeunesse et des Sports et par le secrétariat d'État à l'Économie Solidaire.

6 jeunes témoignent

Pour ouvrir les débats, et pour leur servir de support, les participants ont assisté à la projection d'un reportage de 52 minutes dans lequel trois garçons et trois filles racontent leur vie de jeune homo et de jeune lesbienne, de leur coming-out à leurs amours, en passant par leurs relations avec les copains, les études ou le travail. Ces témoignages ont été enregistrés par Bruno Pommier au cours d'un atelier réalisé lors de la précédente édition de l'Université d'Eté avec l'aide de la Direction Départementale de l'Action Sanitaire et Sociale des Bouches-du-Rhône. La projection n'a pas laissé indifférents les auditeurs du colloque, qui revivaient à travers les témoignages de Sandra, Alexandre, Nicolas et leurs amis leur propre expérience de l'émergence à la vie gaie. Le film, co-produit par la DDASS, servira à la formation des intervenants sociaux.

 

La DGS et les jeunes gais

En réponse à ces témoignages, Robert Simon, fonctionnaire à la Direction Générale de la Santé (DGS) a pris la parole pour évoquer comment son ministère travaillait en faveur des jeunes homosexuels. Un premier axe de travail concerne la prévention du sida. Beaucoup reste encore à faire, comme le montre la dernière enquête presse menée par l'INVS, qui a révélé que 23% des répondants reconnaissaient des pratiques anales sans protection. Le ministère s'intéresse également à la santé des lesbiennes, cible du cancer du sein et peu touchée par les campagnes de prévention. Mais surtout, dans le cadre de la prévention du suicide chez les jeunes - l'une des premières causes de mortalité dans cette population -, la DGS mène des actions spécifiques pour prévenir les dégâts générés par l'homophobie. Robert Simon rappelait « il y a un lien très fort entre violation des droits de l'Homme et santé ». Pour que l'homophobie ne tue plus, le ministère a mis en oeuvre des programmes de santé dans six régions françaises et a impliqué le Conseil Permanent de la Jeunesse pour renforcer ses chances de réussite. Ces programmes prévoient de soutenir les associations de jeunes gais, d'ouvrir une ligne d'écoute et de développer les études sur la sexualité et le genre.

Jeunesse et Sport

Dans son intervention, Gilles Garnier, représentant de la Jeunesse et des Sports, a reconnu que par le passé, son ministère n'avait pas été un partenaire très présent auprès des associations gaies et lesbiennes. Mais la situation évolue... la ministre Marie-Jo Buffet s'est rendue l'an dernier au CGL de Paris. Elle a aussi assisté à l'inauguration du nouveau local parisien du MAG - le Mouvement pour une Adolescence Gaie. L'objectif du ministère est désormais d'établir des relations contractuelles avec les associations gaies et lesbiennes, notamment avec les associations de jeunes, pour leur donner les moyens de vivre, en toute indépendance. Dans ce cadre, l'Université d'Eté des Homosexualités est reconnue d'éducation populaire et de nombreuses associations de jeunes gais sont très impliquées dans les conseils départementaux de jeunes.

AIDES aux côtés des jeunes

Christian Saout, président national d'AIDES, a pris ensuite la parole pour se livrer à une analyse approfondie des actions gouvernementales. Monsieur Saout a justifié l'intervention de son association en expliquant qu'« il n'y a pas de santé publique sans respect des droits de l'Homme ». Pour cette raison, AIDES a toujours mené de front opérations sur le terrain et actions politiques. Constatant que l'homophobie est la première cause de suicide chez les jeunes gais, Christian Saout a réclamé un dispositif de pénalisation des propos homophobes. « Cela fait deux ans qu'on l'attend » a-t-il déploré, en faisant remarquer qu'aucun élu n'assistait au colloque. Il a aussi regretté l'absence de programme d'information et suggéré en vrac l'ouverture d'un numéro vert pour les jeunes gais, et la nomination d'un médiateur de l'homophobie, comme en Suède.

Des ateliers d'approfondissement

Les participants au colloque ont pu ensuite approfondir les notions abordées par les intervenants du matin. Forence Leroy-Forgeot, chargée d'enseignement à Paris XIII et à Reims, a livré les résultats de l'enquête qu'elle a menée auprès des jeunes. L'homophobie et la lesbophobie induits par un jugement de Platon, mal transmis par Saint Augustin qui a ensuite servi de fondement aux lois qui nous régissent, mènent à l'auto-dépréciation, à l'isolement, voire à l'exclusion de la communauté. Pour cesser cette spirale, il faut couper court à toute transmission d'idée homophobe. Florence Leroy-Forgeot estime qu'« il faut pénaliser tous les propos homophobes, même ceux qui sont très généralistes ».

François Delors, psychanalyste, directeur de l'Observatoire du Sida et des sexualités des facultés universitaires Saint-Louis à Bruxelles, a évoqué pour sa part l'affirmation de soi, les cheminements empruntés par les jeunes homosexuels et leurs souffrances. Au cours de son intervention, Brigitte Lhomond, sociologue et chercheur au CNRS, a abordé la question de la sexualité des jeunes et de l'homosexualité. Michel Dorais, professeur de l'université Laval à Québec, en compagnie de René-Paul Leraton, responsable de la ligne Azur, a détaillé les conséquences de l'homophobie sur la santé des jeunes, plus particulièrement sur les tendances suicidaires. Enfin, autour de Contact, l'association de parents de gais et de lesbiennes, un petit groupe a travaillé sur le thème homophobie, éducation et famille à partir d'une enquête sur l'homophobie dans les lycées classiques et les LEP et de l'expérience italienne dans l'enseignement..

Au cours de la synthèse de la journée, Daniel Borillo, maître de conférence à Paris X, auteur d'un Que sais-je sur le sujet, a approfondi la notion d'homophobie qui est revenue en filigrane tout au long de la journée.

 

Reportage : René Lalement, Pierre Léonard, Jean-Benoît Richard, Donald Suzzoni.

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