Audition du Conseil de la Lesbian & Gay Pride - Paris
auprès de la Commission des Lois du Sénat
le 27 janvier 1999


Cette contribution est soutenue par les associations suivantes, membres du Conseil de la Lesbian & Gay Pride – Paris :


** AIDES, comité Paris - Île de France,
** Angel 91,
** Ardhis (Association pour la reconnaissance des droits des personnes homosexuelles et transsexuelles à l'immigration et au séjour)
** A.S.M.F.,
** Association des Amis de Bonneuil,
** Association des Parents Gais et Lesbiennes,
** Contact (parents, famille et amis des gais et lesbiennes),
** Commission Nationale Gays/Lesbiennes des Verts,
** Coordination Lesbienne (23 associations lesbiennes),
** David & Jonathan (Bureau national et 23 groupes locaux),
** Dégel (association d'étudiants gais et lesbiennes),
** Fédération Sportive Gaie et Lesbienne CGPIF (13 associations)
** Les Gais et Lesbiennes Branchés,
** Les Gai Musette,
** Homosexualités et Socialisme,
** Lesbian & Gay Pride - Paris,
** MAG- Jeunes Gais & Lesbiennes,
** Mémorial de la Déportation Homosexuelle,
** Revue H,




Table des matières




I - REMERCIEMENTS-

II - CADRE DE NOTRE INTERVENTION

II - a) Notre attachement au PACS ne date pas d’hier

II - b) Le sens de notre intervention de ce jour

III - NOS REMARQUES SUR LE TEXTE

III - a) Sur l’esprit du texte

* L'utilité sociale du couple enfin détachée de la procréation

* Le couple comme nouveau référent social

* L'égalité dans le droit à la différence

* Inclure les fratries brouillerait l'image des couples unis par un PACS

* Il faut assurer le suivi sociologique du PACS

III - b) Sur les délais d’ouverture des droits et l'aspect fiscal

* L'incohérence des délais relatifs à l'imposition commune

* Le caractère vexatoire des délais et des taux relatifs aux dons et legs

* La prise en compte d'une réalité déjà présente

III - c) Sur le lieu de signature et les registres spécifiques

III - d) Sur l'autorité juridique face à la famille

III - e) Sur les couples binationaux

III - f) Sur la reconnaissance mutuelle des statuts non maritaux

IV - Annexe: frais de succession entre couple :

IV - a) Présentation des hypothèses

IV - b) Résultats


I - REMERCIEMENTS-

Nous remercions la Commission des Lois pour avoir organisé cette audition, en particulier son président M. Jacques Larché et le rapporteur sur le PACS M. Patrice Gélard. En effet, nous considérons que l'audition des représentants des associations homosexuelles et lesbiennes constitue en soi une forme de reconnaissance institutionnelle. Nous ne pouvons donc que nous féliciter de l'évolution de l'approche politique de l'homosexualité, qui est passée de l'incompréhension et de la répression (amendement dit "Mirguet" sur l'inclusion de l'homosexualité parmi les "fléaux sociaux" en juillet 1960; refus de la dépénalisation de l'homosexualité lors de la discussion de la loi sur le viol et les attentas aux mœurs, en 1979/80 ), à la dépénalisation (Loi N° 82-683 abrogeant le deuxième alinéa de l'article 331 du code pénal), puis enfin à la prise en compte des aspirations des homosexuels et des lesbiennes, dont le PACS est un aspect important.

Nous nous réjouissons que le débat sur le PACS soit à présent porté devant les Sénateurs, et nous espérons que notre contribution pourra leur être utile pour améliorer le texte au cours de leurs discussions. Nous tenons à rappeler que nous n'intervenons pas seulement en notre nom propre, mais aussi en celui des associations cosignataires de notre intervention, issues des divers horizons de la vie associative gaie et lesbienne.

II - CADRE DE NOTRE INTERVENTION

II - a) Notre attachement au PACS ne date pas d’hier

Notre association organise depuis neuf ans une Marche homosexuelle en juin à Paris, la Lesbian & Gay Pride. Elle est dotée d’un Conseil qui regroupe une trentaine d’associations homosexuelles et lesbiennes, parisiennes ou nationales. Notre action est soutenue par de nombreuses organisations pour les Droits de la Personne Humaine, des syndicats, des mutuelles, des partis politiques, etc.. Depuis plusieurs années, nous soutenons les textes qui proposent de résoudre la question des couples non mariés, dont une proportion est constituée de personnes homosexuelles. Nous avons régulièrement interpellé les Pouvoirs publics sur le thème du C.U.S. (Contrat d'Union Sociale), puis du PACS, et organisé une réflexion des associations homosexuelles et lesbiennes sur les différents aspects des textes proposés. L’irruption du sida et ses conséquences sociales désastreuses nous ont toujours incitées à appuyer un texte qui préserve les droits des survivants de couples. Pour autant, nous avons toujours préféré les propositions qui dépassaient le cadre spécifique de la question homosexuelle, et s'inscrivaient dans la démarche citoyenne de refus d'un statut particulier réservé aux seuls couples homosexuels..

En cela, nous n’avons fait que suivre les orientations de nos mandants associatifs, favorables dans leur écrasante majorité à un texte républicain qui, au-delà des problèmes liés au manque de droits des couples gais et lesbiens, puisse s’appliquer à l’ensemble des citoyens. Il y a trois ans, le C.U.S. était déjà le mot d’ordre central de notre Marche, qui rassemblait alors 150.000 personnes. En 1997, la forte affluence de l’Euro-Pride (près de 300.000 participants) a été une nouvelle occasion pour les associations, les personnes homosexuelles, leurs familles et leurs nombreux amis de montrer leur attachement au C.U.S. L’an passé, plus de 150.000 manifestants ont encore réclamé clairement l'adoption rapide du PACS.

Le Pacte Civil de Solidarité est l'aboutissement d'un travail entamé depuis plus de sept ans. Il va permettre d’apporter à l’ensemble de la société, notamment aux gais et lesbiennes, un nouvel instrument de cohésion sociale. Il est temps pour le législateur de prendre acte des évolutions de notre société, à la fois marquées par la montée en puissance du concubinage et par une reconnaissance accrue du lien homosexuel, hier voué à la clandestinité et à l’opprobre, aujourd’hui accepté par une majorité grandissante de nos concitoyens. La France rejoindra alors, avec retard, le groupe imposant des pays européens qui ont déjà résolu avec succès l'intégration des couples homosexuels dans leur société.

Nous espérons que notre intervention aidera la Haute Assemblée à mieux comprendre l’urgente nécessité du PACS, qui doit permettre une plus grande intégration à la communauté nationale de toutes celles et tous ceux dont la situation est ignorée des lois existantes. Ce vide juridique est source de tensions sociales et de souffrances individuelles.

II - b) Le sens de notre intervention de ce jour

Pour la préparation de cette audition, nous avons consulté les nombreuses associations de notre Conseil pour faire entendre au mieux leurs préoccupations. L’opinion générale des signataires de cette intervention est que le texte répond correctement aux préoccupations centrales des couples gais et lesbiens. Nous estimons que ce nouveau statut, parce qu'il reconnaît, entre autres, les couples homosexuels, ne pourra qu'accélérer leur intégration et leur acceptation dans la société. Nous pensons également que cette reconnaissance aura une grande importance pour les jeunes gais et lesbiennes découvrant leur sexualité, et qui, faute de repères positifs, développent en moyenne plus de comportements autodestructeurs, voire suicidaires, que le reste de la population dans la même tranche d'âge. Si nombre d'associations membres de notre Conseil estiment que le texte ne règle pas toutes les difficultés des couples de même sexe, nous restons conscients que tout ne peut se résoudre en un jour, et que, justement, le PACS permettra, à terme, une évolution encore plus nette de l'opinion publique en faveur d'une meilleure égalité des droits entre tous les couples.

Au nom de notre Conseil, nous sommes donc amenés à porter un avis favorable sur la proposition de loi relative au Pacte Civil de Solidarité.

Cependant, telle qu'elle ressort après son adoption en première lecture par l’Assemblée Nationale, nous estimons qu'elle pourrait être améliorée. Nous espérons donc que nos remarques et demandes aideront le Parlement à adopter un texte plus proche des souhaits que forment la majorité des personnes homosexuelles concernées.

Nous songeons également à la suite immédiate de l'adoption définitive de la loi, et en particulier à la publication des décrets d'application. Notre association et l'ensemble de nos mandats resteront très mobilisés pour que ces décrets ne se fassent pas attendre, que leur rédaction dissipe les éventuelles imprécisions laissées par le texte, et que leur orientation soit celles d'une application généreuse et libérale de la loi.

III - NOS REMARQUES SUR LE TEXTE

III - a) Sur l’esprit du texte

Notre expérience du terrain nous a appris que les personnes homosexuelles en couple, comme les personnes hétérosexuelles non mariées, ne s’engageront dans le PACS que s’il apporte avec quelque souplesse et célérité les avantages qui en découlent. L’esprit même du texte serait dénaturé si des embûches étaient placées sur le chemin des candidats au PACS : il émane de pareilles mises à l’épreuve un parfum de méfiance peu compatible avec la notion de solidarité qui se veut le fondement du pacte. Cette observation guide notre réflexion en matière de délais, de taux de taxation, de procédure. C’est à sa lumière qu’il faut lire les propositions des chapitres III-b à III-d.

* L'utilité sociale du couple enfin détachée de la procréation

À nos yeux, la grande innovation du PACS est qu'il permet aux couples, à tous les couples, d'être reconnus en tant que tels. Pour nous –mais cette opinion est de plus en plus forte au sein de la société, le couple ne saurait être réduit à l’hypothèse d’une potentialité reproductrice. Il existe par le lien affectif qui lie deux personnes et par leur choix délibéré d’inscrire dans l’espace des relations sociales la solidarité qui naît de cette affection. Ce choix suffit à assurer l’utilité sociale du couple tel qu’il est posé par le PACS : deux personnes vivant ensemble risquent moins la précarité -les effets de la maladie ou du chômage par exemple- et, à traitement égal, le niveau de vie du couple sera plus élevé que celui de deux célibataires du simple fait de la mise en commun des frais fixes (logement, nourriture, etc..). Sur le plan des liens affectifs et humains, cette reconnaissance est la seule façon de permettre à la personne qui partage sa vie avec une autre de soutenir cette dernière dans toutes les épreuves, y compris celle de la mort, de ne pas être spoliée ou expulsée du logement commun en cas de décès de sa/son partenaire, de pouvoir conserver les meubles et l’environnement de la vie de son couple, d'obtenir une reconnaissance et un soutien social à l'occasion de ces épreuves ou de ce deuil. Ces exemples, qu’on pourrait décliner à l’infini, confirment la pertinence de la reconnaissance de l’utilité sociale du couple instaurée par le PACS.

Et si l’innovation majeure du PACS est de placer sur un pied d’égalité tous les couples, qu’ils soient de même sexe ou de sexes différents, nous observons que cette démarche est largement comprise et réclamée par une majorité de citoyens, d'autant qu'elle ne remet aucunement en cause les formes d'union existantes.

* Le couple comme nouveau référent social

Mais le PACS aura des effets bénéfiques au delà des couples stricto sensu. En effet, en reconnaissant les couples qui ne pouvaient ou ne voulaient s'inscrire dans les statuts actuels, il leur permet de consolider des structures jusque là informelles, il les fait accéder à un rôle de référent social, bref, il en en fait des acteurs nouveaux dans la structuration de la société, laquelle en profitera également.

Il est clair, dans notre optique et après les années passées à se battre pour la visibilité des homosexuels et des lesbiennes, que nous ne pouvons que nous réjouir de cette évolution qui nous rapproche d'une égalité de traitement avec les couples hétérosexuels et favorise la légitimation sociale de l'homosexualité.

Nous sommes d'autant plus attachés à cet aspect des choses que nous sommes persuadés que l'existence de ce statut donnera aux adolescents gais et lesbiennes la possibilité de trouver autour d'eux des références de couples reconnus qui les aideront à mieux construire leur propre relationnel affectif. Nous en espérons une diminution des souffrances de ces jeunes, qui pourront s'appuyer sur des exemples positifs pour se construire, au lieu d'intérioriser l'homophobie ambiante.

* L'égalité dans le droit à la différence

Pour autant, revendiquer l’égalité, ce n’est pas nier les différences et nous ne prétendons pas que les relations homosexuelles et hétérosexuelles soient identiques. Justement, le PACS va dans le bon sens puisque, loin de consacrer la caricature du couple homosexuel comme une forme de négation de l’altérité, ce qu’il n’est pas, il affirme l’universalité du sentiment qui porte deux êtres l’un vers l’autre et fait du couple une unité fondamentale de solidarité dans notre société. Ainsi, le PACS innove fondamentalement en ce qu'il reconnaît le caractère universel, quoique spécifique, du lien affectif particulier qui fonde le couple.

* Inclure les fratries brouillerait l'image des couples unis par un PACS

Le débat sur le C.U.S. puis sur le PACS aura montré que d’autres liens de solidarité existent, comme les fratries ou les cellules de solidarités à deux ou plus. Ces formes de vie commune procèdent d’un investissement affectif différent du couple parce qu'ils présupposent l'absence de vie sexuelle partagée ou de relation amoureuse. Les problèmes qui sont posés par ces formes de communautés de vie n’en sont pas moins réels et doivent être réglés. Par nature, ils sont principalement matériels et ne suscitent pas le besoin d’une reconnaissance symbolique. C’est pourquoi nous pensons qu’une réponse spécifique, sous forme d'une loi dédiée, serait mieux adaptée à ces situations que le PACS, qui est de surcroît limité à deux personnes. Il ne nous semble pas non plus que ce soit rendre service aux personnes concernées que de régler leurs problèmes au détour de cette loi, et comme en catimini. Et que dire de l'effet de brouillage que constituerait le mélange forcé de situations aussi dissemblables, alors que le PACS a vocation à devenir un nouveau repère social comme formule de vie de couple.

* Il faut assurer le suivi sociologique du PACS

Enfin, nous soutenons l'idée d'installer, une fois le texte adopté, un suivi sociologique du PACS afin de d'étudier sa mise en place, son impact social et son évolution à moyen terme. Afin aussi de proposer, après quelques années d’usage du nouveau statut, les axes d’une réforme législative ou réglementaire tenant compte tant des éventuels dysfonctionnements mis à jour que de l’évolution de la société.

III - b) Sur les délais d’ouverture des droits et l'aspect fiscal

* L'incohérence des délais relatifs à l'imposition commune

Alors qu’il oblige les accédants à des devoirs immédiats, le PACS suppose des délais rédhibitoires avant de donner des droits, ce qui n’est pas acceptable. Si l’ensemble des associations de notre Conseil se réjouit du raccourcissement de certains délais en première lecture à l’Assemblée nationale, elles considèrent cependant unanimement qu’un effort doit encore être fait, car le texte actuel repousserait à 2003 la première année où l’imposition commune de deux partenaires signant aujourd’hui aurait un effet sur l’impôt versé. Il faut dissiper cette atmosphère de méfiance, et nous demandons la suppression totale des délais prévu aux articles 2-I, 3-I et 3-III de la loi.

Si l’on veut que le public concerné utilise le PACS, il est contre-productif de lui imposer des délais vexatoires. Que prouve-t-on en leur imposant une attente de plus de deux ans pour concrétiser fiscalement la réalité de leur situation? Nous pensons que cette mesure n’est destinée qu’à ceux qui craignent (ou feignent de croire) à la possibilité d’une évasion fiscale massive. Or une simulation fiscale simple démontre que la déclaration commune ne serait avantageuse que dans l’unique cas de couples dont l’un des membres a une différence notable de revenus avec l’autre, et sera neutre ou même désavantageuse dans tous les autres cas.

À ce sujet, nous observons que si les délais liés à l'imposition commune sont maintenus à l'année du troisième anniversaire de la signature, l'administration pourra, quant à elle, tirer immédiatement les conséquences du PACS en ce qui concerne les prestations sociales, ce qui conduira inévitablement à une baisse des revenus des personnes les plus fragiles, voire même à la disparition de certaines aides. N'y a-t-il pas là l'apparence d'une volonté de la part de l'État de se défausser de son devoir de solidarité sur le dos des couples ainsi formés?

Accessoirement, nous signalons au législateur que, dans son état actuel, la loi conduit à l'incohérence fiscale vis-à-vis de certains couples, en particulier ceux dont l'un au moins est redevable de l'Impôt de Solidarité sur la Fortune. En effet, dans ce cas, l'impôt sera dû par les deux personnes dès la signature du PACS, et payé sur leurs revenus courants, lesquels ne seront pas pris en compte pour l'imposition commune avant au moins deux ans...

Nous rappelons avec force que, dans le cas où ces délais seraient maintenus en l'état, un des buts même de la loi (sécuriser la situation des couples "informels"), ne pourrait pas raisonnablement être atteint. Comment peut-on imaginer, alors que la signature d’un PACS sera un acte majeur de la vie civile, qu’en contrepartie de cet engagement solennel, on ne puisse bénéficier de ses avantages avant plusieurs années? Face à des dispositions aussi incohérentes et aléatoires, nombre des couples que la loi vise à mieux intégrer risquent de bouder ce statut.

* Le caractère vexatoire des délais et des taux relatifs aux dons et legs

Pour ce qui concerne le régime des dons et legs ainsi que des droits liés à la succession, le délai de deux ans nous paraît tout simplement vexatoire. De plus, que dira le législateur confronté à l’apparition de situations semblables à celles qui existent actuellement (en particulier en cas de décès), mais qui surviendront dans des couples liés par un PACS de moins de deux ans? Qu’adviendra-t-il si l’un des partenaires meurt accidentellement ou des complications d’une maladie bénigne, n'entrant pas dans le cadre des 3° et 4° de l'article L.322-3 du code de la sécurité sociale?

Enfin, l'équité voudrait que la loi prévoie un taux et un abattement sur les successions proches de ceux constatés sur les successions actuelles entre époux sans enfants. Les taux actuellement prévus sur les legs (40 % en deçà de 100.000 F, 50 % pour le reste) et sur les droits de mutation à titre gratuit (abattement de 300.000 F) sont tout simplement confiscatoires, et obligeront en général le survivant du couple à vendre ce qui constitue pour beaucoup la part la plus importante de tout patrimoine: l'appartement commun. Une simulation simple sur la valeur moyenne des deux-pièces parisiens (650.000 F) montre qu'après abattements, l'impôt est de 165.000 F (soit le quart de la valeur du bien), alors qu'il serait de 18.750 F (soit 2,88 % de la valeur du bien) dans le cas du survivant d'un couple marié sans enfant.

* La prise en compte d'une réalité déjà présente

Il nous semble important que la loi prenne en compte tout le travail effectué par les associations pour encourager les couples homosexuels à se signaler dans leurs mairies en signant une déclaration de vie commune. Des milliers de personnes ont déjà fait, à cette occasion, montre de leur volonté de vie commune. Des milliers d’autres n’attendent que l’instauration du PACS pour faire de même. Dans le cas où le législateur maintiendrait des délais pour l'obtention de certains droits, nous suggérons que des mesures transitoires obligent les diverses administrations à tenir compte des preuves de vie commune (déclaration de concubinage ou de vie commune, bail aux deux noms), pour annuler les délais d’application prévus dans le texte actuel. Nous sommes persuadés que cette mesure permettrait un succès immédiat du PACS et en validerait la démarche. Nous sommes également persuadés que cet afflux massif ramènerait rapidement à leurs justes proportions les campagnes haineuses contre le projet, et ferait taire ceux qui ne voient dans ce texte qu’une promotion masquée du "mariage homosexuel".

III - c) Sur le lieu de signature et les registres spécifiques

Comme nous insistons (III-a) sur le fait que le PACS doit conférer une véritable reconnaissance au couple, il nous semble que les partenaires liés par un pacte civil de solidarité ne devraient plus être considérés juridiquement comme "célibataires". Il est donc nécessaire que le PACS porte modification de l’état des personnes. Ceci implique qu’il soit porté dans les registres d’État Civil. Ces registres étant tenus par les Officiers d’État Civil, le PACS doit, selon nous, nécessairement être signé en mairie.

Nous ne voyons que des avantages à cette solution de cohérence. La reconnaissance symbolique de l’engagement du couple dans le PACS sera plus forte puisque l’état civil des personnes sera modifié; les démarches de nos concitoyens seront facilitées par la proximité des mairies; le rôle hautement symbolique de l’État Civil ne sera pas remis en cause par la création de registres analogues, en d’autres lieux, et hors la présence du maire; les démarches administratives seront facilitées.

À ce sujet, un des arguments fréquemment invoqué pour refuser la signature du PACS en mairie est qu'on peut craindre que certains maires ne se refusent, par dogmatisme, à permettre la signature de PACS dans leur commune. Cet argument nous semble parfaitement méprisant pour le Parlement, car nous n’osons imaginer qu’un législateur responsable accepte de se voir influencer par un groupe de citoyens se disant prêts à refuser d’appliquer la Loi, alors même qu’ils sont les premiers magistrats de nos villes.

Enfin, quels que soient le registre et le lieu de signature finalement retenus, nous demandons que toutes les dispositions soient prises pour garantir l'interdiction d'exploitation commerciale de fichiers de PACS.

III - d) Sur l'autorité juridique face à la famille

Un point qui n'est pas formellement établi dans le texte est celui des potentiels conflits d'autorité entre les partenaires du PACS et leurs familles respectives. En particulier, nous aimerions que soit précisé qu'en cas d'invalidité de l'un des contractants, l'autorité juridique est reconnu au second partenaire plutôt qu'à la famille, ou qu'au moins, la famille ne peut s'opposer à la volonté explicite de la personne malade de confier ses affaires à sa/son partenaire. Ceci est particulièrement important dans le cas de maladie grave, où la famille pourrait écarter le partenaire, le priver de droit de visite ou même interdire aux corps médical de le renseigner sur l'état de sa/son partenaire.

III - e) Sur les couples binationaux

Nous exprimons l’opinion d’une forte majorité des associations homosexuelles en soulignant notre satisfaction de voir le texte s’attaquer à un problème lancinant : celui des partenaires étrangers, souvent réduits, y compris dans les cas de couples hétérosexuels, à recourir à des expédients illégaux pour continuer à vivre auprès de ceux qu’ils aiment. Cependant, nous constatons que la rédaction actuelle de l'article 6 est extrêmement ambiguë, et donne un trop large champ d'appréciation à l'administration pour l'accès des étrangers pacsés à la naturalisation ou au titre de séjour. Nous demandons en conséquence une rédaction de l’article 6 plus précise et contraignante pour l'administration, afin que, dans le cas de couples vivant ensemble en France depuis un an, le partenaire étranger puisse accéder sans difficultés à la nationalité française, ainsi que le spécifiait fort à propos l'ancien l'article 19 de la proposition de loi déposée en mai 98 à l'Assemblée nationale.

Nous formulons la même demande, avec une application immédiate dès la signature du PACS, quant à l’obtention d’un titre de séjour.

Pour ceux qui brandissent la menace d'un détournement d'objet du PACS (PACS "blancs", voire "filières d'immigration"), nous ferons remarquer que le PACS prévoit explicitement la mise en commun des ressources matérielles, et la co-responsabilité financière vis-à-vis des créanciers. Ceci nous semble largement suffisant pour limiter tout usage abusif. Cette responsabilité financière devrait au contraire rassurer l'administration sur la réalité et la pérennité du lien contracté.

III - f) Sur la reconnaissance mutuelle des statuts non maritaux

Alors que l'intégration européenne est une réalité de chaque jour, il nous semble important de demander que soit prévue la possibilité pour tout couple de ressortissants de l'Union Européenne, déjà liés par un lien non marital reconnu par leur pays d’origine, de pouvoir bénéficier des avantages du PACS en cas de résidence prolongée en France, et ce avec des délais nuls ou réduits pour accéder aux droits qui s’en infèrent.


Pour le Conseil de la Lesbian & Gay Pride,

Dominique Touillet, porte-parole politique du Conseil.

IV -

Annexe: frais de succession entre couple :

IV - a) Présentation des hypothèses

Le but de cette simulation est de calculer les frais d'impôts dans les cas d'indivision sur un appartement, acheté en commun à 50/50, avec assurance décès de chaque copropriétaire sur sa part propre. Elle ne prend pas en compte les effets dus aux parts réservataires (ascendants et descendants), et suppose que la personne décédée donne par testament la totalité de sa part au survivant.

Les abattements retenus pour le PACS sont ceux supposés mis en place en 2001, à savoir 375.000 F.

Trois situations sont analysées: concubinage, PACS, mariage.

Trois valeurs d'appartement sont retenues: 600.000 F, 1.000.000 F, 2.000.000 F.

IV - b) Résultats

Bien immobilier évalué à 600.000 F


Concubins

Pacsés

Mariés

Part à hériter

(50 % de la valeur du bien)

300.000 F

300.000 F

300.000 F

Abattement forfaitaire

(sur taux prévus en 2001)

10.000 F

375.000 F

500.000 F

Partie taxable

290.000 F

0 F

0 F

Frais de succession hors de la partie taxable (taux et tranches)

60 % sur 290.000 F:

174.000 F


0 F


0 F

Taux d'imposition en %

58 %

0 %

0 %


Bien immobilier évalué à 1.000.000 F


Concubins

Pacsés

Mariés

Part à hériter

(50 % de la valeur du bien)

500.000 F

500.000 F

500.000 F

Abattement forfaitaire

(sur taux prévus en 2001)

10.000 F

375.000 F

500.000 F

Partie taxable

490.000 F

125.000 F

0 F

Frais de succession hors de la partie taxable (taux et tranches)

60 % sur 490.000 F:


294.000 F

40 % sur 100.000 F

50 % sur 25.000 F

52.500 F



0 F

Taux d'imposition en %

58,8 %

10,5 %

0 %


Bien immobilier évalué à 2.000.000 F


Concubins

Pacsés

Mariés

Part à hériter

(50 % de la valeur du bien)

1.000.000 F

1.000.000 F

1.000.000 F

Abattement forfaitaire

(sur taux prévus en 2001)

10.000 F

375.000 F

500.000 F

Partie taxable

990.000 F

625.000 F

500.000 F

Frais de succession hors de la partie taxable (taux et tranches)

60 % sur 990.000 F:




594.000 F

40 % sur 100.000 F

50 % sur 525.000 F



302.500 F

5 % sur 50.000 F

10 % sur 25.000 F

15 % sur 25.000 F

20 % sur 400.000 F

88.750 F

Taux d'imposition en %

59,4 %

30,25 %

8.875 %



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La France Gaie et Lesbienne

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Last modified: Wed Jan 27 14:48:00 MET 1999
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