Audition du
Conseil de la Lesbian & Gay Pride - Paris
auprès de la Commission des Lois du Sénat
le 27 janvier 1999
Cette
contribution est soutenue par les associations suivantes, membres
du Conseil de la Lesbian & Gay Pride
Paris :
- ** AIDES,
comité Paris - Île de France,
-
** Angel
91,
-
** Ardhis
(Association pour la reconnaissance des droits
des personnes homosexuelles et transsexuelles à l'immigration
et au séjour)
-
** A.S.M.F.,
-
** Association
des Amis de Bonneuil,
-
** Association
des Parents Gais et Lesbiennes,
-
** Contact
(parents, famille et amis des gais et
lesbiennes),
-
** Commission
Nationale Gays/Lesbiennes des Verts,
-
** Coordination
Lesbienne (23 associations lesbiennes),
-
** David
& Jonathan (Bureau national et 23 groupes
locaux),
-
** Dégel
(association d'étudiants gais et
lesbiennes),
-
** Fédération
Sportive Gaie et Lesbienne CGPIF (13
associations)
-
** Les
Gais et Lesbiennes Branchés,
-
** Les
Gai Musette,
-
** Homosexualités
et Socialisme,
-
** Lesbian
& Gay Pride - Paris,
-
** MAG-
Jeunes Gais & Lesbiennes,
-
** Mémorial
de la Déportation Homosexuelle,
-
** Revue
H,
Table des
matières
I
- REMERCIEMENTS-
II
- CADRE DE NOTRE INTERVENTION
II -
a) Notre attachement au PACS ne date pas dhier
II -
b) Le sens de notre intervention de ce jour
III
- NOS REMARQUES SUR LE TEXTE
III -
a) Sur lesprit du texte
* L'utilité
sociale du couple enfin détachée de la procréation
* Le
couple comme nouveau référent social
* L'égalité
dans le droit à la différence
* Inclure
les fratries brouillerait l'image des couples unis par un PACS
* Il faut
assurer le suivi sociologique du PACS
III -
b) Sur les délais douverture des droits et l'aspect
fiscal
* L'incohérence
des délais relatifs à l'imposition commune
* Le
caractère vexatoire des délais et des taux relatifs
aux dons et legs
* La
prise en compte d'une réalité déjà
présente
III -
c) Sur le lieu de signature et les registres spécifiques
III -
d) Sur l'autorité juridique face à la famille
III -
e) Sur les couples binationaux
III -
f) Sur la reconnaissance mutuelle des statuts non maritaux
IV
- Annexe: frais de succession entre couple :
IV -
a) Présentation des hypothèses
IV -
b) Résultats
I
- REMERCIEMENTS-
Nous remercions la
Commission des Lois pour avoir organisé cette audition, en
particulier son président M. Jacques Larché et le
rapporteur sur le PACS M. Patrice Gélard. En effet, nous
considérons que l'audition des représentants des
associations homosexuelles et lesbiennes constitue en soi une forme
de reconnaissance institutionnelle. Nous ne pouvons donc que nous
féliciter de l'évolution de l'approche politique de
l'homosexualité, qui est passée de l'incompréhension
et de la répression (amendement dit "Mirguet" sur
l'inclusion de l'homosexualité parmi les "fléaux
sociaux" en juillet 1960; refus de la dépénalisation
de l'homosexualité lors de la discussion de la loi sur le viol
et les attentas aux murs, en 1979/80 ), à la
dépénalisation (Loi N° 82-683 abrogeant le
deuxième alinéa de l'article 331 du code pénal),
puis enfin à la prise en compte des aspirations des
homosexuels et des lesbiennes, dont le PACS est un aspect important.
Nous nous réjouissons
que le débat sur le PACS soit à présent porté
devant les Sénateurs, et nous espérons que notre
contribution pourra leur être utile pour améliorer le
texte au cours de leurs discussions. Nous tenons à rappeler
que nous n'intervenons pas seulement en notre nom propre, mais aussi
en celui des associations cosignataires de notre intervention, issues
des divers horizons de la vie associative gaie et lesbienne.
II
- CADRE DE NOTRE INTERVENTION
II
- a) Notre attachement au PACS ne date pas dhier
Notre association
organise depuis neuf ans une Marche homosexuelle en juin à
Paris, la Lesbian & Gay Pride. Elle est dotée dun
Conseil qui regroupe une trentaine dassociations homosexuelles
et lesbiennes, parisiennes ou nationales. Notre action est soutenue
par de nombreuses organisations pour les Droits de la Personne
Humaine, des syndicats, des mutuelles, des partis politiques, etc..
Depuis plusieurs années, nous soutenons les textes qui
proposent de résoudre la question des couples non mariés,
dont une proportion est constituée de personnes homosexuelles.
Nous avons régulièrement interpellé les Pouvoirs
publics sur le thème du C.U.S. (Contrat d'Union Sociale), puis
du PACS, et organisé une réflexion des associations
homosexuelles et lesbiennes sur les différents aspects des
textes proposés. Lirruption du sida et ses conséquences
sociales désastreuses nous ont toujours incitées à
appuyer un texte qui préserve les droits des survivants de
couples. Pour autant, nous avons toujours préféré
les propositions qui dépassaient le cadre spécifique de
la question homosexuelle, et s'inscrivaient dans la démarche
citoyenne de refus d'un statut particulier réservé aux
seuls couples homosexuels..
En cela, nous navons
fait que suivre les orientations de nos mandants associatifs,
favorables dans leur écrasante majorité à un
texte républicain qui, au-delà des problèmes
liés au manque de droits des couples gais et lesbiens, puisse
sappliquer à lensemble des citoyens. Il y a trois
ans, le C.U.S. était déjà le mot dordre
central de notre Marche, qui rassemblait alors 150.000 personnes. En
1997, la forte affluence de lEuro-Pride (près de 300.000
participants) a été une nouvelle occasion pour les
associations, les personnes homosexuelles, leurs familles et leurs
nombreux amis de montrer leur attachement au C.U.S. Lan passé,
plus de 150.000 manifestants ont encore réclamé
clairement l'adoption rapide du PACS.
Le Pacte Civil de
Solidarité est l'aboutissement d'un travail entamé
depuis plus de sept ans. Il va permettre dapporter à
lensemble de la société, notamment aux gais et
lesbiennes, un nouvel instrument de cohésion sociale. Il est
temps pour le législateur de prendre acte des évolutions
de notre société, à la fois marquées par
la montée en puissance du concubinage et par une
reconnaissance accrue du lien homosexuel, hier voué à
la clandestinité et à lopprobre, aujourdhui
accepté par une majorité grandissante de nos
concitoyens. La France rejoindra alors, avec retard, le groupe
imposant des pays européens qui ont déjà résolu
avec succès l'intégration des couples homosexuels dans
leur société.
Nous espérons que
notre intervention aidera la Haute Assemblée à mieux
comprendre lurgente nécessité du PACS, qui doit
permettre une plus grande intégration à la communauté
nationale de toutes celles et tous ceux dont la situation est ignorée
des lois existantes. Ce vide juridique est source de tensions
sociales et de souffrances individuelles.
II
- b) Le sens de notre intervention de ce jour
Pour la préparation
de cette audition, nous avons consulté les nombreuses
associations de notre Conseil pour faire entendre au mieux leurs
préoccupations. Lopinion générale des
signataires de cette intervention est que le texte répond
correctement aux préoccupations centrales des couples gais et
lesbiens. Nous estimons que ce nouveau statut, parce qu'il reconnaît,
entre autres, les couples homosexuels, ne pourra qu'accélérer
leur intégration et leur acceptation dans la société.
Nous pensons également que cette reconnaissance aura une
grande importance pour les jeunes gais et lesbiennes découvrant
leur sexualité, et qui, faute de repères positifs,
développent en moyenne plus de comportements autodestructeurs,
voire suicidaires, que le reste de la population dans la même
tranche d'âge. Si nombre d'associations membres de notre
Conseil estiment que le texte ne règle pas toutes les
difficultés des couples de même sexe, nous restons
conscients que tout ne peut se résoudre en un jour, et que,
justement, le PACS permettra, à terme, une évolution
encore plus nette de l'opinion publique en faveur d'une meilleure
égalité des droits entre tous les couples.
Au nom de notre
Conseil, nous sommes donc amenés à porter un avis
favorable sur la proposition de loi relative au Pacte Civil de
Solidarité.
Cependant, telle qu'elle
ressort après son adoption en première lecture par
lAssemblée Nationale, nous estimons qu'elle pourrait
être améliorée. Nous espérons donc que nos
remarques et demandes aideront le Parlement à adopter un texte
plus proche des souhaits que forment la majorité des personnes
homosexuelles concernées.
Nous songeons également
à la suite immédiate de l'adoption définitive de
la loi, et en particulier à la publication des décrets
d'application. Notre association et l'ensemble de nos mandats
resteront très mobilisés pour que ces décrets ne
se fassent pas attendre, que leur rédaction dissipe les
éventuelles imprécisions laissées par le texte,
et que leur orientation soit celles d'une application généreuse
et libérale de la loi.
III
- NOS REMARQUES SUR LE TEXTE
III
- a) Sur lesprit du texte
Notre expérience
du terrain nous a appris que les personnes homosexuelles en couple,
comme les personnes hétérosexuelles non mariées,
ne sengageront dans le PACS que sil apporte avec quelque
souplesse et célérité les avantages qui en
découlent. Lesprit même du texte serait dénaturé
si des embûches étaient placées sur le chemin des
candidats au PACS : il émane de pareilles mises à
lépreuve un parfum de méfiance peu compatible
avec la notion de solidarité qui se veut le fondement du
pacte. Cette observation guide notre réflexion en matière
de délais, de taux de taxation, de procédure. Cest
à sa lumière quil faut lire les propositions des
chapitres III-b à III-d.
*
L'utilité sociale du couple enfin
détachée de la procréation
À nos yeux, la
grande innovation du PACS est qu'il permet aux couples, à tous
les couples, d'être reconnus en tant que tels. Pour nous mais
cette opinion est de plus en plus forte au sein de la société,
le couple ne saurait être réduit à lhypothèse
dune potentialité reproductrice. Il existe par le lien
affectif qui lie deux personnes et par leur choix délibéré
dinscrire dans lespace des relations sociales la
solidarité qui naît de cette affection. Ce choix suffit
à assurer lutilité sociale du couple tel quil
est posé par le PACS : deux personnes vivant ensemble
risquent moins la précarité -les effets de la maladie
ou du chômage par exemple- et, à traitement égal,
le niveau de vie du couple sera plus élevé que celui de
deux célibataires du simple fait de la mise en commun des
frais fixes (logement, nourriture, etc..). Sur le plan des liens
affectifs et humains, cette reconnaissance est la seule façon
de permettre à la personne qui partage sa vie avec une autre
de soutenir cette dernière dans toutes les épreuves, y
compris celle de la mort, de ne pas être spoliée ou
expulsée du logement commun en cas de décès de
sa/son partenaire, de pouvoir conserver les meubles et
lenvironnement de la vie de son couple, d'obtenir une
reconnaissance et un soutien social à l'occasion de ces
épreuves ou de ce deuil. Ces exemples, quon pourrait
décliner à linfini, confirment la pertinence de
la reconnaissance de lutilité sociale du couple
instaurée par le PACS.
Et si linnovation
majeure du PACS est de placer sur un pied dégalité
tous les couples, quils soient de même sexe ou de sexes
différents, nous observons que cette démarche est
largement comprise et réclamée par une majorité
de citoyens, d'autant qu'elle ne remet aucunement en cause les formes
d'union existantes.
*
Le couple comme nouveau référent
social
Mais le PACS aura des
effets bénéfiques au delà des couples stricto
sensu. En effet, en reconnaissant les couples qui ne pouvaient ou ne
voulaient s'inscrire dans les statuts actuels, il leur permet de
consolider des structures jusque là informelles, il les fait
accéder à un rôle de référent
social, bref, il en en fait des acteurs nouveaux dans la
structuration de la société, laquelle en profitera
également.
Il est clair, dans notre
optique et après les années passées à se
battre pour la visibilité des homosexuels et des lesbiennes,
que nous ne pouvons que nous réjouir de cette évolution
qui nous rapproche d'une égalité de traitement avec les
couples hétérosexuels et favorise la légitimation
sociale de l'homosexualité.
Nous sommes d'autant plus
attachés à cet aspect des choses que nous sommes
persuadés que l'existence de ce statut donnera aux adolescents
gais et lesbiennes la possibilité de trouver autour d'eux des
références de couples reconnus qui les aideront à
mieux construire leur propre relationnel affectif. Nous en espérons
une diminution des souffrances de ces jeunes, qui pourront s'appuyer
sur des exemples positifs pour se construire, au lieu d'intérioriser
l'homophobie ambiante.
*
L'égalité dans le droit à
la différence
Pour autant, revendiquer
légalité, ce nest pas nier les différences
et nous ne prétendons pas que les relations homosexuelles et
hétérosexuelles soient identiques. Justement, le PACS
va dans le bon sens puisque, loin de consacrer la caricature du
couple homosexuel comme une forme de négation de laltérité,
ce quil nest pas, il affirme luniversalité
du sentiment qui porte deux êtres lun vers lautre
et fait du couple une unité fondamentale de solidarité
dans notre société. Ainsi, le PACS innove
fondamentalement en ce qu'il reconnaît le caractère
universel, quoique spécifique, du lien affectif particulier
qui fonde le couple.
*
Inclure les fratries brouillerait l'image des
couples unis par un PACS
Le débat sur le
C.U.S. puis sur le PACS aura montré que dautres liens de
solidarité existent, comme les fratries ou les cellules de
solidarités à deux ou plus. Ces formes de vie commune
procèdent dun investissement affectif différent
du couple parce qu'ils présupposent l'absence de vie sexuelle
partagée ou de relation amoureuse. Les problèmes qui
sont posés par ces formes de communautés de vie nen
sont pas moins réels et doivent être réglés.
Par nature, ils sont principalement matériels et ne suscitent
pas le besoin dune reconnaissance symbolique. Cest
pourquoi nous pensons quune réponse spécifique,
sous forme d'une loi dédiée, serait mieux adaptée
à ces situations que le PACS, qui est de surcroît limité
à deux personnes. Il ne nous semble pas non plus que ce soit
rendre service aux personnes concernées que de régler
leurs problèmes au détour de cette loi, et comme en
catimini. Et que dire de l'effet de brouillage que constituerait le
mélange forcé de situations aussi dissemblables, alors
que le PACS a vocation à devenir un nouveau repère
social comme formule de vie de couple.
*
Il faut assurer le suivi sociologique du PACS
Enfin,
nous soutenons l'idée d'installer, une fois le texte adopté,
un suivi sociologique du PACS afin de d'étudier sa mise en
place, son impact social et son évolution à moyen
terme. Afin aussi de proposer, après quelques années
dusage du nouveau statut, les axes dune réforme
législative ou réglementaire tenant compte tant des
éventuels dysfonctionnements mis à jour que de
lévolution de la société.
III
- b) Sur les délais douverture des
droits et l'aspect fiscal
*
L'incohérence des délais relatifs à
l'imposition commune
Alors quil oblige
les accédants à des devoirs immédiats, le PACS
suppose des délais rédhibitoires avant de donner des
droits, ce qui nest pas acceptable. Si lensemble des
associations de notre Conseil se réjouit du raccourcissement
de certains délais en première lecture à
lAssemblée nationale, elles considèrent cependant
unanimement quun effort doit encore être fait, car le
texte actuel repousserait à 2003 la première année
où limposition commune de deux partenaires signant
aujourdhui aurait un effet sur limpôt versé.
Il faut dissiper cette atmosphère de méfiance, et nous
demandons la suppression totale des délais prévu aux
articles 2-I, 3-I et 3-III de la loi.
Si lon veut que le
public concerné utilise le PACS, il est contre-productif de
lui imposer des délais vexatoires. Que prouve-t-on en leur
imposant une attente de plus de deux ans pour concrétiser
fiscalement la réalité de leur situation? Nous pensons
que cette mesure nest destinée quà ceux qui
craignent (ou feignent de croire) à la possibilité
dune évasion fiscale massive. Or une simulation fiscale
simple démontre que la déclaration commune ne serait
avantageuse que dans lunique cas de couples dont lun des
membres a une différence notable de revenus avec lautre,
et sera neutre ou même désavantageuse dans tous les
autres cas.
À ce sujet, nous
observons que si les délais liés à l'imposition
commune sont maintenus à l'année du troisième
anniversaire de la signature, l'administration pourra, quant à
elle, tirer immédiatement les conséquences du PACS en
ce qui concerne les prestations sociales, ce qui conduira
inévitablement à une baisse des revenus des personnes
les plus fragiles, voire même à la disparition de
certaines aides. N'y a-t-il pas là l'apparence d'une volonté
de la part de l'État de se défausser de son devoir de
solidarité sur le dos des couples ainsi formés?
Accessoirement, nous
signalons au législateur que, dans son état actuel, la
loi conduit à l'incohérence fiscale vis-à-vis de
certains couples, en particulier ceux dont l'un au moins est
redevable de l'Impôt de Solidarité sur la Fortune. En
effet, dans ce cas, l'impôt sera dû par les deux
personnes dès la signature du PACS, et payé sur leurs
revenus courants, lesquels ne seront pas pris en compte pour
l'imposition commune avant au moins deux ans...
Nous rappelons avec force
que, dans le cas où ces délais seraient maintenus en
l'état, un des buts même de la loi (sécuriser la
situation des couples "informels"), ne pourrait pas
raisonnablement être atteint. Comment peut-on imaginer, alors
que la signature dun PACS sera un acte majeur de la vie civile,
quen contrepartie de cet engagement solennel, on ne puisse
bénéficier de ses avantages avant plusieurs années?
Face à des dispositions aussi incohérentes et
aléatoires, nombre des couples que la loi vise à mieux
intégrer risquent de bouder ce statut.
*
Le caractère vexatoire des délais
et des taux relatifs aux dons et legs
Pour ce qui concerne le
régime des dons et legs ainsi que des droits liés à
la succession, le délai de deux ans nous paraît tout
simplement vexatoire. De plus, que dira le législateur
confronté à lapparition de situations semblables
à celles qui existent actuellement (en particulier en cas de
décès), mais qui surviendront dans des couples liés
par un PACS de moins de deux ans? Quadviendra-t-il si lun
des partenaires meurt accidentellement ou des complications dune
maladie bénigne, n'entrant pas dans le cadre des 3° et 4°
de l'article L.322-3 du code de la sécurité sociale?
Enfin, l'équité
voudrait que la loi prévoie un taux et un abattement sur les
successions proches de ceux constatés sur les successions
actuelles entre époux sans enfants. Les taux actuellement
prévus sur les legs (40 % en deçà de
100.000 F, 50 % pour le reste) et sur les droits de
mutation à titre gratuit (abattement de 300.000 F) sont
tout simplement confiscatoires, et obligeront en général
le survivant du couple à vendre ce qui constitue pour beaucoup
la part la plus importante de tout patrimoine: l'appartement commun.
Une simulation simple sur la valeur moyenne des deux-pièces
parisiens (650.000 F) montre qu'après abattements,
l'impôt est de 165.000 F (soit le quart de la valeur du
bien), alors qu'il serait de 18.750 F (soit 2,88 % de la
valeur du bien) dans le cas du survivant d'un couple marié
sans enfant.
*
La prise en compte d'une réalité
déjà présente
Il nous semble important
que la loi prenne en compte tout le travail effectué par les
associations pour encourager les couples homosexuels à se
signaler dans leurs mairies en signant une déclaration de vie
commune. Des milliers de personnes ont déjà fait, à
cette occasion, montre de leur volonté de vie commune. Des
milliers dautres nattendent que linstauration du
PACS pour faire de même. Dans le cas où le législateur
maintiendrait des délais pour l'obtention de certains droits,
nous suggérons que des mesures transitoires obligent les
diverses administrations à tenir compte des preuves de vie
commune (déclaration de concubinage ou de vie commune, bail
aux deux noms), pour annuler les délais dapplication
prévus dans le texte actuel. Nous sommes persuadés que
cette mesure permettrait un succès immédiat du PACS et
en validerait la démarche. Nous sommes également
persuadés que cet afflux massif ramènerait rapidement à
leurs justes proportions les campagnes haineuses contre le projet, et
ferait taire ceux qui ne voient dans ce texte quune promotion
masquée du "mariage homosexuel".
III
- c) Sur le lieu de signature et les registres
spécifiques
Comme nous insistons
(III-a) sur le fait que le PACS doit conférer une véritable
reconnaissance au couple, il nous semble que les partenaires liés
par un pacte civil de solidarité ne devraient plus être
considérés juridiquement comme "célibataires".
Il est donc nécessaire que le PACS porte modification de
létat des personnes. Ceci implique quil soit porté
dans les registres dÉtat Civil. Ces registres étant
tenus par les Officiers dÉtat Civil, le PACS doit, selon
nous, nécessairement être signé en mairie.
Nous ne voyons que des
avantages à cette solution de cohérence. La
reconnaissance symbolique de lengagement du couple dans le PACS
sera plus forte puisque létat civil des personnes sera
modifié; les démarches de nos concitoyens seront
facilitées par la proximité des mairies; le rôle
hautement symbolique de lÉtat Civil ne sera pas remis en
cause par la création de registres analogues, en dautres
lieux, et hors la présence du maire; les démarches
administratives seront facilitées.
À ce sujet, un des
arguments fréquemment invoqué pour refuser la signature
du PACS en mairie est qu'on peut craindre que certains maires ne se
refusent, par dogmatisme, à permettre la signature de PACS
dans leur commune. Cet argument nous semble parfaitement méprisant
pour le Parlement, car nous nosons imaginer quun
législateur responsable accepte de se voir influencer par un
groupe de citoyens se disant prêts à refuser dappliquer
la Loi, alors même quils sont les premiers magistrats de
nos villes.
Enfin, quels que soient
le registre et le lieu de signature finalement retenus, nous
demandons que toutes les dispositions soient prises pour garantir
l'interdiction d'exploitation commerciale de fichiers de PACS.
III
- d) Sur l'autorité juridique face à
la famille
Un point qui n'est pas
formellement établi dans le texte est celui des potentiels
conflits d'autorité entre les partenaires du PACS et leurs
familles respectives. En particulier, nous aimerions que soit précisé
qu'en cas d'invalidité de l'un des contractants, l'autorité
juridique est reconnu au second partenaire plutôt qu'à
la famille, ou qu'au moins, la famille ne peut s'opposer à la
volonté explicite de la personne malade de confier ses
affaires à sa/son partenaire. Ceci est particulièrement
important dans le cas de maladie grave, où la famille pourrait
écarter le partenaire, le priver de droit de visite ou même
interdire aux corps médical de le renseigner sur l'état
de sa/son partenaire.
III
- e) Sur les couples binationaux
Nous exprimons lopinion
dune forte majorité des associations homosexuelles en
soulignant notre satisfaction de voir le texte sattaquer à
un problème lancinant : celui des partenaires étrangers,
souvent réduits, y compris dans les cas de couples
hétérosexuels, à recourir à des
expédients illégaux pour continuer à vivre
auprès de ceux quils aiment. Cependant, nous constatons
que la rédaction actuelle de l'article 6 est extrêmement
ambiguë, et donne un trop large champ d'appréciation à
l'administration pour l'accès des étrangers pacsés
à la naturalisation ou au titre de séjour. Nous
demandons en conséquence une rédaction de larticle 6
plus précise et contraignante pour l'administration, afin que,
dans le cas de couples vivant ensemble en France depuis un an, le
partenaire étranger puisse accéder sans difficultés
à la nationalité française, ainsi que le
spécifiait fort à propos l'ancien l'article 19 de la
proposition de loi déposée en mai 98 à
l'Assemblée nationale.
Nous formulons la même
demande, avec une application immédiate dès la
signature du PACS, quant à lobtention dun titre de
séjour.
Pour ceux qui brandissent
la menace d'un détournement d'objet du PACS (PACS "blancs",
voire "filières d'immigration"), nous ferons
remarquer que le PACS prévoit explicitement la mise en commun
des ressources matérielles, et la co-responsabilité
financière vis-à-vis des créanciers. Ceci nous
semble largement suffisant pour limiter tout usage abusif. Cette
responsabilité financière devrait au contraire rassurer
l'administration sur la réalité et la pérennité
du lien contracté.
III
- f) Sur la reconnaissance mutuelle des statuts
non maritaux
Alors que l'intégration
européenne est une réalité de chaque jour, il
nous semble important de demander que soit prévue la
possibilité pour tout couple de ressortissants de l'Union
Européenne, déjà liés par un lien non
marital reconnu par leur pays dorigine, de pouvoir bénéficier
des avantages du PACS en cas de résidence prolongée en
France, et ce avec des délais nuls ou réduits pour
accéder aux droits qui sen infèrent.
Pour
le Conseil de la Lesbian & Gay Pride,
Dominique Touillet,
porte-parole politique du Conseil.
IV -
Annexe: frais de succession
entre couple :
IV
- a) Présentation des hypothèses
Le but de cette
simulation est de calculer les frais d'impôts dans les cas
d'indivision sur un appartement, acheté en commun à
50/50, avec assurance décès de chaque copropriétaire
sur sa part propre. Elle ne prend pas en compte les effets dus aux
parts réservataires (ascendants et descendants), et suppose
que la personne décédée donne par testament la
totalité de sa part au survivant.
Les abattements retenus
pour le PACS sont ceux supposés mis en place en 2001, à
savoir 375.000 F.
Trois situations sont
analysées: concubinage, PACS, mariage.
Trois valeurs
d'appartement sont retenues: 600.000 F, 1.000.000 F,
2.000.000 F.
IV
- b) Résultats
Bien
immobilier évalué à 600.000 F |
|
Concubins |
Pacsés |
Mariés |
Part à
hériter
(50 % de la
valeur du bien) |
300.000 F |
300.000 F |
300.000 F |
Abattement
forfaitaire
(sur taux prévus
en 2001) |
10.000 F |
375.000 F |
500.000 F |
Partie
taxable |
290.000 F |
0 F |
0 F |
Frais
de succession hors de la partie taxable (taux et tranches) |
60 %
sur 290.000 F:
174.000 F |
0 F |
0 F |
Taux
d'imposition en % |
58 % |
0 % |
0 % |
Bien
immobilier évalué à 1.000.000 F |
|
Concubins |
Pacsés |
Mariés |
Part à
hériter
(50 % de la
valeur du bien) |
500.000 F |
500.000 F |
500.000 F |
Abattement
forfaitaire
(sur taux prévus
en 2001) |
10.000 F |
375.000 F |
500.000 F |
Partie
taxable |
490.000 F |
125.000 F |
0 F |
Frais
de succession hors de la partie taxable (taux et tranches) |
60 %
sur 490.000 F:
294.000 F |
40 %
sur 100.000 F
50 % sur
25.000 F
52.500 F |
0 F |
Taux
d'imposition en % |
58,8 % |
10,5 % |
0 % |
Bien
immobilier évalué à 2.000.000 F |
|
Concubins |
Pacsés |
Mariés |
Part à
hériter
(50 % de la
valeur du bien) |
1.000.000 F |
1.000.000 F |
1.000.000 F |
Abattement
forfaitaire
(sur taux prévus
en 2001) |
10.000 F |
375.000 F |
500.000 F |
Partie
taxable |
990.000 F |
625.000 F |
500.000 F |
Frais
de succession hors de la partie taxable (taux et tranches) |
60 % sur
990.000 F:
594.000 F |
40 % sur
100.000 F
50 % sur
525.000 F
302.500 F |
5 % sur
50.000 F
10 % sur
25.000 F
15 % sur
25.000 F
20 % sur
400.000 F
88.750 F |
Taux
d'imposition en % |
59,4 % |
30,25 % |
8.875 % |