Onze associations marseillaises ont écrit une lettre au sous-préfet chargé de la politique de la ville à la préfecture des Bouches-du-Rhône, pour l'inciter à passer outre l'avis défavorable de la DDASS à l'attribution de subvention pour la réalisation de travaux dans le local de Marseille Ar-en-Ciel.
Marseille, le dimanche 16 février 1997 Monsieur Thilo Firchow Sous-Prefet chargé de Mission pour la Politique de la Ville
Monsieur le Sous-Prefet, Nous faisons appel à votre arbitrage sur le dossier d'investissement du local associatif dénommé "le Chaperon Rouge", situé 20 rue Colbert, en Centre Ville. Vous l'avez compris ce dossier est soutenu par la communauté homosexuelle et nous sommes prêts à venir avec les dirigeants de l'association Marseille Arc-en-Ciel, porteuse de ce projet, vous exprimer les raisons de notre soutien. La visibilité homosexuelle a été assez forte à Marseille de 1979 à1987. De 1987 à 1993, les homosexuels, pulvérisés par le drame du SIDA, ont concentré leurs forces sur la lutte contre ce fléau, un peu en ordre dispersé à cause de la pression de l'Urgence. De facto les actions militantes dont, essentiellement, l'aide à l'épanouissement personnel de tout un chacun au sein de structures associaitives et conviviales sont passées au second rang. La disparition de la vie associative a aggravé les risques d'exposition des personnes au SIDA, en faisant disparaître peu à peu la confiance des homosexuels en eux-mêmes, essentielle à leur capacité de se protéger et à vivre la tête haute, malgré leur situation minoritaire. Cette situation encore toute récente est grave pour les homosexuels marseillais en général, elle est particulièrement grave pour les catégories sociales les plus exposées aux brimades et à l'exclusion, ouvrant une autoroute royale vers la précarisation. Un lieu comme ce café associatif permettra aux associations de vivre au grand jour et de participer aux actions de sensibilisation en direction des homosexuels. Qui mieux que les homosexuels eux-mêmes peut agir en direction de ces publics? Mais il est important aussi que la puissance publique apporte enfin à Marseille un réel soutien aux homosexuels qui ne l'ont que très faiblement sollicitée au cours des années passées. Le Contrat de Ville est particulièrement bien placé pour exprimer enfin ce soutien, à travers ses 3 partenaires publics que sont l'État, la Région et la Ville. La Région nous a recemment notifié la dévolution des crédits. La ville devrait voter la subvention au prochain Conseil Municipal. A notre connaissance du côté de l'État, deux positions contradictoires s'expriment. En effet, tandis que la DDE souligne l'absence de priorité concernant les homosexuels dans l'action face au SIDA, dans le Contrat de Ville, ainsi que la dimension trop communautaire de ce projet, la DDASS, au contraire, souligne l'insuffisant affichage homosexuel par une association qui a manifesté une certaine volonté d'agir en faveur de la prévention du SIDA et qui pourtant, indique clairment dans ses statuts son appartenance à la communauté homosexuelle et son refus de l'enfermement dans un gettho. Face à ces deux positionnements, nous vous demandons de soutenir simplement un projet qui exprime enfin une certaine capacité des homosexuels de s'organiser, un café associatif qui peut jouer un rôle actif dans l'animation de ce quartier du centre ville, une association qui n'a surtout pas la prétention de se substituer à d'autres plus expérimentées qu'elle dans la lutte contre le SIDA, mais au contraire d'agir en complémentarité avec les tous acteurs de la prévention. Sur la scène démocratique, il nous parait essentiel que les homosexuels aient enfin, eux aussi, la possibilité de s'organiser et de s'exprimer. Il nous parait essentiel qu'ils soient clairement aidés pour cela. Veuillez croire, monsieur le sous-préfet, à l'expression de nos sentiments respectueux. Les Présidents ou Responsables des associations :
ASSOCIATIONS S'ASSOCIANT À LA PRÉSENTE DÉMARCHE
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Marseille, 3 mars 1997