Euroletter no 81,
août 2000 [fr]

Publiée pour l'ILGA-Europe par Gay and Lesbian International Lobby (GLIL) en coopération avec LBL, l'association danoise nationale pour les gais et les lesbiennes.

Éditeurs: Steffen Jensen, Ken Thomassen, Peter Bryld, Lisbeth Andersen et Soeren Baatrup.

Traduction: Joel Bedos, Isabelle Cruette et Gilles Kleitz

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LA PRESSION DU CONSEIL DE L'EUROPE FAIT PROGRESSER LES DROITS DES LESBIENNES, DES GAYS ET DES BISEXUELS EN EUROPE

Les débats lors de la session de juin de l'Assemblée Parlementaire du Conseil de l'Europe à Strasbourg ont fait faire de grands progrès dans de nombreux domaines aux droits des lesbiennes, gays et bisexuels avec seulement un recul que nous espérons temporaire.

L'accession de l'Arménie et de l'Azerbaïdjan au Conseil de l'Europe

L'Assemblée Parlementaire a voté la semaine dernière en faveur de la candidature de l'Arménie sous réserve de l'obligation pour elle de révoquer les provisions de son code pénal qui criminalise les relations entre personnes de même sexe. L'Assemblée a été informée que même en 1999, quatre hommes avaient été poursuivis dans le cadre de ces articles.

La candidature de l'Azerbaïdjan a également été soutenue. Une obligation similaire devait lui être imposée mais a été retirée après l'annonce que le parlement azéri venait de faire approuver un nouveau code pénal qui lève l'interdiction sur les rapports homosexuels entre adultes consentants.

Nico Beger, la co-déléguée de ILGA-Europe auprès du Conseil de l'Europe a déclarée être "extrêmement satisfaire avec ces progrès. Les 18 mois de lobby se sont révélé être payants quand le Comité de l'Assemblée pour les affaires législatives et les Droits de l'Homme ont pris position pour que l'Assemblée soutienne les droits des gays et lesbiennes dans ces pays".

Débat sur la situation des lesbiennes et gays en Europe

Le vendredi 30 juin, l'Assemblée a tenu son premier débat général depuis 1981 sur la discrimination contre les lesbiennes et gays, autour d'un Rapport et Recommandations proposé par le député hongrois Csaba Tabajdi.

Les Recommandations comportaient un appel au gouvernements européens d'éliminer toute discrimination dans leur codes pénaux, d'introduire une législation anti-discriminatoire protégeant les lesbiennes et gays, de faire explicitement référence à la discrimination pour orientation sexuelle dans la Convention Européenne des Droits de l'Homme, et enfin d'introduire des lois permettant l'enregistrement de partenariats dans leur pays. Une série de discours dithyrambiques a suivi et a accueilli avec ferveur et enthousiasme ces propositions. Les porte-parole de quatre des cinq plus importantes formations politiques parlementaires (les socialistes, la gauche européenne unie, le groupe libéral, le parti populaire européen) ont soutenu les recommandations. Le groupe restant, les démocrates européens (conservateurs) a pris une position neutre. Cependant, à la fin du débat, le vote a été empêché par les opposants arguant que le quorum n'était pas réuni. Le vote a été remis à la session de l'assemblée de septembre.

Le débat a été l'occasion d'un évènement potentiellement important: le chef de la délégation roumaine a annoncé que le mercredi 28 juin, la chambre des députés a voté le retrait complet de l'article 200 the code pénal roumain, et qu'avant le prochain débat parlementaire, le sénat en ferait de même. L'article 200 est l'article de loi le plus notoirement discriminatoire inscrit dans les législations des états membres du Conseil de l'Europe. Cet article a été critiqué à plusieurs reprises par le Conseil de l'Europe et fût critiqué de nouveau par M. Tabajdi dans son Rapport. Cet article est discriminatoire en ce qui concerne l'âge de consentement, la définition de vie privée, et la liberté d'association et d'expression.

Adrian Coman, le directeur exécutif de l'organisation gay et lesbienne roumaine ACCEPT, et membre du Bureau de l'ILGA Europe a fait les commentaires suivants: "Ces développement reflètent à la fois les pressions qu'exerce le Conseil de l'Europe, et également celle de l'Union Européenne. Si le Sénat vote effectivement pour le retrait de l'article 200, c'est bien sur d'excellentes nouvelles. Mais malheureusement, ceci n'est qu'un coté de l'histoire. L'article 201 du Code Pénal roumain (qui punit les "actes de perversion sexuelle, commis en public ou susceptibles de causer un scandale public") a été amendé pour inclure les homosexuels. Sa formulation floue rend possible son utilisation contre les lesbiennes et gays. Nous croyons fermement qu'une définition claire est nécessaire, afin d'éviter des pratiques judiciaires abusives, comme cela c'est produit a mainte reprises avec l'article 200".

Débat sur les droits d'asile et d'immigration pour couple bi-nationaux de même sexe

Dans un débat supplémentaire, l'Assemblée a voté en faveur de recommandations aux gouvernements nationaux pour reconnaître les persécutions du fait d'orientation sexuelle dans l'octroi de droit d'asile, afin que les couples bi-nationaux de même sexe bénéficient des mêmes droits de résidence que les couples bi-nationaux hétérosexuels. Me. Vermot-Mangold (Suisse) qui a présenté ces recommandations, a attiré l'attention de l'Assemblée sur le fait que dans près de 80 pays, les actes homosexuels entre adultes consentants sont encore illégaux, sur les campagnes homophobes des présidents du Zimbabwe et de l'Ouganda, sur la pratique de la peine de mort en Afghanistan, en Iran, et en Arabie Saoudite, et sur le récent emprisonnement et fouettage de gays en Arabie Saoudite.

Nigel Warner, co-délégué homme d'ILGA Europe auprès du Conseil de l'Europe a déclaré: "Ceci constitue un développement important. Nous voilà devant des domaines qui concernent de façon aiguë des membres de notre communauté. Il faut maintenant persuader le Comité des Ministres du Conseil de l'Europe de reprendre ces recommandations, et de les proposer formellement à leur gouvernements". Commentant sur les acquis de la semaine en général, il ajoutait "Ceci représente un progrès formidable pour juste une semaine de travail. Mais cela souligne aussi un fait très grave: dans beaucoup trop de pays européens encore, les gouvernements et parlements ne répondent tout simplement pas aux appels de leurs communautés lesbiennes et gays pour annuler les lois discriminatoires. Le Conseil de l'Europe, à travers l'Assemblée, la Cour Européenne des Droits de l'Homme, ou le Conseil des Ministres, restent un outil essentiel pour faire progresser la reconnaissance des droits fondamentaux des lesbiennes, des gays et des bisexuels".

L'AZERBAIJAN LEVE L'INTERDICTION DES RAPPORTS SEXUELS ENTRE HOMMES

Communiqué de presse de ILGA-EUROPE

Des militants gays en Azerbaïdjan informent que l'interdiction de rapports sexuels entre hommes a été levée dans ce pays. Une édition spéciale du 28 mai du journal "Azerbaïdjan", le journal officiel du parlement rapporte que le parlement a voté un nouveau Code Pénal et que le Président a signé un décret qui en prévoit l'application en septembre. L'ancien article 113 hérité de la période soviétique qui punit les relations sexuelles anales entre hommes de 3 ans de prison a donc été remplacé par l'article 150 qui ne condamne plus que les rapports forcés. L'Azerbaïdjan a déposé sa candidature au Conseil de l'Europe qui doit statuer le 28 juin. L'adoption d'un nouveau Code Pénal fait partie des larges réformes légales et institutionnelles entreprises par l'Azerbaïdjan pour se conformer aux critères du Conseil de l'Europe. L'abolition de lois interdisant les relations homosexuelles fait partie de ces critères. L'ILGA Europe fait campagne depuis 18 mois pour s'assurer que l'abolition de l'article 113 fasse partie des conditions de l'intégration de l'Azerbaïdjan au Conseil de l'Europe. Le mois dernier, un Comité de l'Assemblée Parlementaire a proposé que l'accord sur la candidature de l'Azerbaïdjan soit explicitement conditionné à l'abolition de l'article 113.

Nico Berger, la co-déléguée de ILGA-Europe au Conseil de l'Europe a commenté "c'est une très bonne nouvelle. L'article 113 créait des conditions véritablement problématiques pour les gays, particulièrement à cause des chantages subis par des officiers de police corrompus" Son co-délégué Nigel Warner a ajouté que " depuis l'arrêté historique de la Cour Européenne des Droits de l'Homme dans l'affaire Dudgeon en 1981, 22 pays et territoires en Europe ont aboli les lois interdisant les relations homosexuelles. Dans toute l'Europe, seules l'Arménie, l'entité Bosniaque de Republika Srbska et la République Tchétchène maintiennent encore de telles lois.

CHANGEMENTS LEGISLATIFS EN ROUMANIE

Médiafax, Bucarest 21 juin.

Le député Ervin Szekely de l'Union Démocratique, membre du Comité Législatif a déclaré que "le Comité Législatif de la chambre des députés a ratifié un projet de loi déposé par le Gouvernement pour mettre en conformité le Code Pénal avec la résolution 1123 de 1997 du Conseil de l'Europe qui recommande entre autre l'abolition de l'article 200 du Code Pénal roumain concernant l'homosexualité." L'article 200 du code pénal prévoit une peine de prison pour les relations homosexuelles en public ou créant un scandale public. Le Rapport du Comité Législatif sur le projet de loi doit maintenant être examiné en plénière par la Chambre des Députés.

ABOLITION DE LOIS DISCRIMINATOIRES A CHYPRE

Communiqué de presse de ILGA Europe

NB : après la parution de ce communiqué de presse, des doutes sur l'age de consentement apparurent. Lorsqu'ils seront résolus, cela paraîtra dans l'Euroletter.

Le 8 juin, le Parlement chypriote a adopté une législation qui abolit les dispositions discriminatoires du code pénale restantes contre les hommes homosexuels. Elle égalise l'age de consentement (bien que ce soit en élevant l'age de consentement pour les hommes hétérosexuels de 16 à 18 tandis que celui pour les femmes est à 16 ans), élimine la terminologie péjorative pour l'homosexualité (en remplaçant le terme de "licence contre-nature" par "relations sexuelles entre hommes") et abolit les dispositions discriminatoires sur le caractère privé (qui catégorisaient comme " publics" les actes sexuels en présence de plus de deux personnes)

Les dispositions interdisant "le comportement indécent ou l'invitation, la provocation ou la publicité pour accomplir des actes contre nature entre hommes" ont été restreintes aux actes en direction de mineurs. L'action du parlement chypriote est une réponse tardive à la victoire en 1993 devant la Cour Européenne des Droits de l'Homme (voir plus loin pour plus d'information) du militant gay Alecos Modinos qui a attaqué l'interdiction totale des relations homosexuelles entre hommes qui était en vigueur à l'époque.

Après de long débats et contre une forte hostilité de l'église orthodoxe de Chypre, le Parlement chypriote a aboli l'interdiction totale en 1998 mais en la remplaçant par la législation décrite ci-dessus. Selon les termes de la Convention Européenne des Droits de l'Homme, le Comité des Ministres du Conseil de l'Europe peut s'assurer que les actions entreprises par des gouvernements et des parlements en réponse à un jugement de la Cour Européenne des Droits de l'Homme rectifient effectivement les violations identifiées par le jugement.

Le Comité des Ministres a estimé que la législation de 1998 n'a pas répondu aux arrêtés du jugement et la législation actuelle est le résultat de négociations entre le Comité des Ministres et le Gouvernement chypriote.

ILGA Europe félicite chaleureusement Alecos Modinos. Il lui a fallu onze ans depuis le début de son combat juridique pour finalement parvenir à l'abolition totale de toutes les principales zones de discrimination dans le Code Pénal.

De telles victoires ne peuvent être gagnées qu'au prix d'un grand courage et d'une grande détermination et non sans un coût matériel et émotionnel élevé pour les individus concernés. Dans ce cas particulier, Alecos Modinos a dû faire face a des graves attaques personnelles par l'église orthodoxe. Par exemple, à la suite du jugement initial par la Cour Européenne des Droits de l'Homme en décembre 1990, l'archevêque de Chypre, dans son encyclique de Noël (lues dans toutes les églises de l'île et diffusé à la radio nationale) a protesté contre la décision de la Cour et a appelé tous les chrétiens à la combattre.

Dans une interview à la presse le 27 décembre, il a ajouté que "l'homosexualité peut être dissimulée mais nous excommunierons les homosexuels notoires et leur refuserons leurs droits de chrétiens et un enterrement chrétien". ILGA Europe apprécie aussi que le Comité des Ministres ait insisté que les changements législatifs initiaux étaient insuffisants, ce qui n'aurait vraisemblablement pas été envisageable il y a seulement quelques années.

Cela est un signe supplémentaire du consensus qui existe parmi les Etats européens que la discrimination sur la base de l'orientation sexuelle est inacceptable.

Nigel Warner, co-délégué au Conseil de l'Europe de ILGA-Europe déclare : "c'est un véritable pas en avant, mais il est dommage que le parlement chypriote n'ait pas eu le bon sens d'abolir toutes les discriminations et n'ait égalisé l'age de consentement qu'en élevant celui pour les hommes hétérosexuels à 18 ans. Cette disposition irréaliste ne fait que discréditer la loi totalement. De plus, la différenciation de l'age de consentement entre hommes et femmes constitue un cas de discrimination sexuelle".

L'HISTOIRE DU CHANGEMENT LEGISLATIF A CHYPRE

Par Alexander F. Modinos

Dans l'après midi du 8 juin 2000, le Comité Législatif du Parlement a présenté, sans que cela figure à l'ordre du jour, une nouvelle loi sur l'homosexualité, à la grande surprise des 40 députés présents. A Chypre, l'homosexualité est un sujet "tabou", malgré la publicité qui lui est faite depuis 1989 quand le militant gay, l'architecte Alexander Modinos, a porté plainte auprès de la Commission Européenne des Droits de l'Homme contre son pays pour violation de ses droits de l'homme comme homosexuel.

Il est bien connu qu'en avril 93, la Cour Européenne a statué à la quasi-unanimité ( tous les neufs juges, à l'exception du juge chypriote !!) que Chypre violait les droits de l'homme des personnes homosexuelles et que la législation existante devait être abolie. Après beaucoup de pressions et 5 années plus tard, la loi anti-gay de 1885 a été amendée en mai 98 tout en ménageant la puissante église orthodoxe, des 57 associations chrétiennes et la majorité des députés de l'opposition de telle sorte que la nouvelle loi était porteuse de nombreuses discriminations et de ce fait, pire que la loi précédente. En fait, le procureur Général a insisté lors d'une conférence de presse "nous n'avons pas légalisé l'homosexualité. Au contraire, nous avons aménagé la loi pour que les actes homosexuels soient pénalisés" !!

Les principaux articles discriminatoires étaient les suivants :

La terminologie caractérisant les relations homosexuelles était de "atteinte à l'ordre naturel", ce qui a un sens purement négatif.

L'age de consentement, 18 ans, était de deux ans de plus que pour les hétérosexuels. La loi ignore totalement les lesbiennes, comme si elles n'existaient pas. La sphère privée de nos foyers devient un lieu public en présence d'une tierce personne. La peine maximale de 14 ans de prison a été élevée à la réclusion à perpétuité. Le fameux article 174a prévoit une peine d'un an de prison si nous "invitons, provoquons, publions, incitons... à la sodomie".

Je me suis immédiatement élevé violemment contre cette loi discriminatoire. Les associations de défense des droits de l'homme et d'autres organisations scientifiques se sont prononcées contre cette loi, de même qu'Amnesty International et un Comité de l'Union européenne a émis l'avis que cette loi interdisait à Chypre de devenir un membre de l'UE. Avec mon avocat Achilleas L. Demetriades, j'ai envoyé cinq courriers au Conseil des Ministres pour dénoncer les dispositions discriminatoires et mettre en évidence que cette loi n'était pas conforme à la convention européenne.

Finalement, en septembre 1999, le Conseil des Ministres a déclaré cette loi inacceptable. Une nouvelle loi conforme à la convention et à l'esprit de notre époque devrait être rédigée.

L'église orthodoxe doit à présent faire face à deux scandales importants : Un Archidiacre de 50 ans est accusé d'avoir eu une relation avec une jeune femme et d'être le père de ses deux filles. L'archidiacre à son tour accuse l'évêque de Limassol d'être homosexuel. une lettre de 22 pages, écrite par un coiffeur pour dames de 33 ans installé à Salonique en Grèce, et qui est un moine défroqué, a été portée à la connaissance du "Saint Synode". Le coiffeur accuse l'évêque d'avoir eu une relation avec lui 18 ans plus tôt alors qu'il avait 15 ans et qu'ils étaient tous les deux moines dans un monastère du Mont Athos. Un comité épiscopal a été chargé de conduire des enquêtes sur ces deux cas et le Comité Législatif du Parlement en a profité pour faire voter la nouvelle loi sur l'homosexualité. Ainsi, quand des journalistes ont demandé à l'Archevêque de Chypre de se prononcer au lendemain de l'adoption de la loi, celui ci a demandé de quelle loi il s'agissait. Quand on lui a répondu qu'il s'agissait de la loi sur l'homosexualité et que celle-ci était maintenant légale il a déclaré être "profondément attristé par la nouvelle, que le Parlement a légalisé la perversion". L'Archevêque n'a pas été le seul à être surpris par la présentation soudaine au Parlement. Selon un journal local, "parmi les 40 députés présents au Parlement, 27 sont sortis de la salle en guise de protestation. Des 13 restants, essentiellement de droite, deux ont voté contre et 11 pour. La nouvelle loi qui réglemente les relations homosexuelles est maintenant en vigueur." Cette nouvelle loi représente un grand progrès, la seule source de discrimination majeure restante étant la différence de l'age du consentement pour les relations homosexuelles de deux ans plus élevé que pour les relations hétérosexuelles.

Bien sur, Chypre n'est pas le seul pays membre du Conseil de l'Europe qui instaure cette discrimination honteuse.

En bref, les nouvelles dispositions sont : "rapports sexuels entre hommes" a remplacé la terminologie "atteinte à l'ordre naturel" Le caractère privé de nos foyers est maintenu, quel que soit le nombre de personnes présentes, sous réserve que le public ne puisse pas y avoir accès.

Le fameux article 174a ne s'adresse plus qu'au personnes qui n'ont pas atteint l'age de consentement.

Je pense que le Conseil des Ministres estimera qu'avec cette nouvelle législation, Chypre s'est finalement aligné sur la décision de 1993 de la Cour Européenne. Il est triste qu'en ce début du XXIème siècle, nous, les homosexuels devons dépenser autant de temps et d'énergie, subir autant d'angoisse et de nuits blanches, sans même parler de l'argent dépensé, pour faire reconnaître l'égalité de nos droits.

Il est triste aussi de voir que les homosexuels de Chypre ne partagent pas mes aspirations et qu'ils se contentent de tellement peu ! A ce jour, deux homosexuels seulement se sont affirmé publiquement, les autres restant dans le placard. Est-ce le sort des gays et lesbiennes qui vivent dans des sociétés restreintes ?

Il y a encore un long chemin à parcourir et une tâche difficile à accomplir, par moi même. L'égalité de tous les citoyens au regard de la loi n'est que la moindre des choses à demander. Ce que nous devons atteindre est une vraie égalité dans les mentalités et les comportements quotidiens de tous.

L'Ecosse annule la "section 28"

By Rex Wokner

Le nouveau Parlement écossais a voté le 21 juin l'annulation locale de la "Section 28", une loi anglaise mise en place il y a dix ans par le gouvernement Tatcher et qui interdit aux enseignants et aux municipalités de "promouvoir intentionnellement l'homosexualité" et d'enseigner à l'école que "l'homosexualité est un mode acceptable de relation".

Les parlementaires ont voté à 99 voix pour l'annulation de la "section 28", contre 17 abstentions. Nicola Sturgeon du Parti National Ecossais a parlé d'"un texte de loi honteux, fondé sur la discrimination, et qui a été imposé à l'Ecosse par Westminster (parlement du Royaume-Uni). Il sera aujourd'hui annulé en Ecosse, devançant les autres parties du Royaume Uni. Nous sommes fiers de ce que cela représente pour l'Ecosse". Trish Godman, député Labour du Parlement écossais pour West Renfrewshire a déclaré "Après plusieurs accrochages, ceci est un jour de calme fierté, qui ouvre le chemin pour une Ecosse nouvelle et tolérante". Jusqu'à ce jour, les motions pour annuler la "section 28" ont toutes été bloquées par la chambre des Lords du Royaume Uni, dominée par le parti conservateur.

La "section 28" reste appliquée dans le reste du Royaume Uni

By Mike Peacock, REUTERS - 24/07/00

Le Premier Ministre du Royaume Uni, Tony Blair se bat pour sauver une des ses propositions emblématiques après une défaite embarrassante devant la Chambre des Lords. La Chambre Haute du Parlement a voté lundi soir le rejet d'une loi concernant le Gouvernement Local qui aurait annulé une clause introduite par le gouvernement conservateur de Margaret Tatcher qui interdit aux autorités locales de "promouvoir l'homosexualité". Blair a marqué son attachement a l'annulation de cette clause, dite "section 28", mais n'a pas donné d'indications sur la façon dont il comptait procéder dorénavant. Un programme parlementaire déjà extrêmement chargé pourrait le pousser à ajourner l'annulation de la clause, qui, selon des professeurs et instituteurs, empêche des actions d'information et de prévention contre les violences homophobes, et bloque également le vote du reste de la loi concernant les modalités d'élection des maires et autres réformes attendues par les gouvernements locaux. "Le point principal est de décider si ces sujets doivent faire l'objet d'une proposition unique ou de propositions séparées" a déclaré Blair un peu avant le vote. Un ministre du Gouvernement dans la Chambre Haute a déclaré qu'il s'agissait d'une question d'égalité : égalité pour tous ? "Nous pensons que les personnes de sexualité différente de celle de la majorité... doivent en droit recevoir le même traitement de la part des autorités" a-t-il déclaré. "Cette Assemblée s'est toujours considérée constitutionnellement responsable de la protection des droits des minorités. Si nous conservons la "Section 28", nous faisons exactement le contraire". La Chambre des Lords a infligé une série de défaites au gouvernement depuis que Blair a évincé les membres héréditaires de cette assemblée. En février, la Chambre des Lords rejetait l'annulation de la "section 28" par 45 voix. Depuis, Blair a désigné 30 parlementaires du Labour et des Démocrates Libéraux. Son gouvernement a également réagit aux pressions des conservateurs en amendant une loi sur l'éducation qui stipule que l'éducation sexuelle doit enseigner aux élèves "la nature du mariage et son importance pour la vie de famille et l'éducation des enfants". Mais la défaite ce lundi, 270 voix contre 228, est quasi identique à celle de février. La baronne Young, fer de lance de l'opposition conservatrice au Gouvernement sur ce sujet, déclara qu'elle était ravie de la défaite du Gouvernement mais qu'elle était entièrement contre tout préjugé contre les gays. "Je crois", a-t-elle déclaré "que la chambre des Lords a encore une fois parlé pour la majorité du peuple britannique. Tony Blair devrait abandonner son obsession de promouvoir l'homosexualité et s'atteler à sa responsabilité d'élu: gouverner la majorité moyenne, plutôt que suivre des minorités politiquement correctes".

Le Parlement écossais a annulé la "section 28" en juin (voir ci-dessus).

Arrêt dans l'affaire A.D.T. contre Royaume Uni

Communiqué du Greffier de la Cour Européenne des Droits de l'Homme

La Cour européenne des Droits de l'Homme a communiqué aujourd'hui par écrit son arrêt dans l'affaire A.D.T. c. Royaume-Uni. La Cour dit, à l'unanimité, qu'il y a eu violation de l'article 8 (droit au respect de la vie privée et familiale) de la Convention européenne des Droits de l'Homme, et qu'il n'y a pas lieu d'examiner le grief tiré de l'article 14 (interdiction de discrimination). En application de l'article 41 (satisfaction équitable) de la Convention, la Cour alloue au requérant 20 929,05 livres sterling (GBP) au titre du préjudice subi et 12 391,83 GBP pour frais et dépens.

1/ Principaux faits.

Le requérant, ressortissant britannique né en 1948, est homosexuel. A la suite d'une visite domiciliaire effectuée par la police, il fut arrêté et conduit au commissariat local, où il reconnut que certaines cassettes vidéo saisies lors de la perquisition comportaient des séquences le représentant, lui et jusqu'à quatre hommes adultes, se livrant à des actes sexuels à son domicile. Il fut reconnu coupable d'attentat aux moeurs, au sens de l'article 13 de la loi de 1956 sur les infractions sexuelles et, le 20 novembre 1996, bénéficia d'une absolution assortie de mesures de sûreté pendant deux ans.

Le requérant soutient que son inculpation et sa condamnation pour participation, dans le cadre privé de son domicile, à des actes sexuels avec plus d'un adulte consentant de sexe masculin, constituent une atteinte à sa vie privée, protégée par l'article 8 de la Convention. Il se dit par ailleurs victime d'une discrimination contraire à l'article 14 de la Convention, car des personnes hétérosexuelles ou des femmes homosexuelles se livrant en groupe à des activités sexuelles analogues auraient échappé à toute poursuite, aucune législation n'interdisant de telles pratiques.

2/ Procédure et composition de la Cour

La requête a été introduite devant la Commission européenne des Droits de l'Homme le 25 mars 1997. La Cour (troisième section) l'a déclarée recevable le 16 mars 1999. Une audience a eu lieu le 30 novembre 1999. L'arrêt a été rendu par une chambre composée de sept juges, à savoir : Jean-Paul Costa (Français), président, Willi Fuhrmann (Autrichien), Loukis Loucaides (Cypriote), Pranas Kuris (Lituanien), Nicolas Bratza (Britannique), Hanne Sophie Greve (Norvégienne), Kristaq Traja (Albanais), juges, ainsi que Sally Dollé, greffière de section.

3/ Résumé de l'arrêt

Griefs

Le requérant se plaint de la violation de ses droits garantis par les articles 8 et 14 de la Convention.

Décision de la Cour

Article 8

La Cour estime qu'il y a eu ingérence dans l'exercice par le requérant du droit au respect de sa vie privée, à la fois en raison de l'existence de la loi interdisant les activités sexuelles menées en privé entre plus de deux hommes consentants et du fait de la condamnation elle-même.

La Cour observe que la condamnation repose non pas sur l'enregistrement des vidéos mais sur les actes eux-mêmes. Elle ajoute que les activités en cause revêtaient un caractère purement privé, en ce sens qu'il n'était guère probable que les enregistrements entrent dans le domaine public. En pareilles circonstances, la marge d'appréciation de l'Etat défendeur était étroite.

La Cour ne constate aucun « besoin social impérieux » de nature à justifier la législation en cause ou son application dans les poursuites engagées contre le requérant. Elle conclut donc à la violation de l'article 8 de la Convention.

Article 14 combiné avec l'article 8 de la Convention

Ayant conclu à la violation de l'article 8, la Cour estime qu'il n'y a pas lieu de surcroît d'examiner le grief tiré de l'article 14.

Article 41

La Cour alloue au requérant 20 929,05 GBP au titre du préjudice subi et 12 391,83 GBP pour frais et dépens.

Les arrêts de la Cour sont disponibles sur son site Internet.

[texte de l'arrêt]


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