DECEMBRE 1998
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Nous avons connu notre ami Jorge en 1983, peu aprËs son arrivÈe du BrÈsil. Jorge nous avait racontÈ quil Ètait issu dune famille nombreuse et trËs riche. Son pËre Ètait un grand industriel allemand et sa mËre, une journaliste cÈlËbre, avec qui il voyageait de palace en palace. Jai su plus tard quil sÈtait inventÈ la famille et le monde de son choix. Vers la fin des annÈes 80, Jorge a trouvÈ un emploi ý mi-temps ý lOpÈra Comique, comme rÈgisseur de la danse. Mon mari, qui avait montÈ une agence publicitaire dans le milieu mÈdical, lui a proposÈ un autre mi-temps comme chargÈ des relations publiques. ´ Tout va bien ª En 1989, nous avons appris que les parents de mon mari avaient ÈtÈ
contaminÈs par le HIV par voie de transfusion. Ils sont dÈcÈdÈs en
1990 ; cest ý cette Èpoque que Jorge a commencÈ ý prendre des
matinÈes pour des rendez-vous mÈdicaux. Il marrivait souvent
de déjeuner avec lui et je me rendais compte quil avait
des problËmes dermatologiques, mais je ne pensais pas au sida. EnfermÈ en lui-mÍme En ÈtÈ 1992, Jorge a ÈtÈ hospitalisÈ. Nous Ètions toujours dans le non-dit, mais
il savait que je savais. JÈtais trËs prÈsente et, aprËs le dÈcËs de mes
beaux-parents, jÈtais mieux armÈe pour laccompagner. Jorge se taisait
toujours. Nous respectons le fait quil na pas voulu parler et en mÍme temps,
nous avons souffert - pour lui, mais aussi pour nous - de ne pas pouvoir lui apporter un
soutien. Envie dagir Il est toujours excessivement prÈsent en nous et nous parlons souvent de lui. Les dÈcËs consÈcutifs de mes beaux-parents et puis de Jorge mont fait entrevoir quil y avait dans cette maladie un univers de douleur qui nexiste pas dans les autres. Avec ce que javais vÈcu, je ne pouvais pas rester sans rien faire. Et jai eu envie dagir pour que tout ce que nous avions vÈcu en nÈgatif se transforme quelque part en une action positive. Brigitte |