Avertissement : sauf mention contraire, les thèses exprimées dans cette page sont celles de l'auteur de l'ouvrage, telles qu'on peut les appréhender à la lecture de celui-ci. Ces thèses ne correspondent pas nécessairement aux opinions de l'auteur de l'article, Sylvie DUGEAY, ni à celles du comité rédactionnel de REMAIDES.
Ce petit roman pour adolescents a pour héros Thomas, 15 ans, séropositif à la suite d'une transfusion sanguine. Thomas débarque dans un nouveau collège, sa sérologie est connue des professeurs et ils sont supposés garder le secret. Mais voilà, Elsa tombe amoureuse de Thomas, un prof s'affole et prévient les parents, qui le disent à leur Þlle - n'investis donc pas dans cette relation sans avenir ÞÞlle (elle a 15 ans) - laquelle va pleurer cette traîtrise (pourquoi ne m'a-t-il rien diiiit) dans le giron de sa copine et la nouvelle se répand comme une traînée de poudre, suivie d'un cortège de moqueries, de vexations, d'interdiction de cours de gym etc. sur le dos de Thomas qui s'en va fricoter avec la bande de loubards du coin qui eux au moins n'ont pas peur ni pitié de lui. Car entre-temps l'Elsa compréhensive va s'évertuer à entourer son Thomas d'un cocon protecteur qu'il exècre.
En gros, une histoire où tous font ce qu'il ne faut pas faire, pour mieux montrer ce qu'il vaudrait mieux faire. Dans ce type de situation, tous les points de vue (dire ou taire la séropositivité ; comprendre le malheur et éviter la pitié ; vouloir être comme les autres et héberger le VIH, etc.) s'affrontent sur un mode binaire, inadapté, trop simple : voilà la description d'une société dont les membres sont responsables - ce qui justiÞe tout diktat - et jamais coupables. Les vrais coupables, on dirait que c'est la loi du nombre, le qu'en dira-t-on, la tradition, et pourquoi pas la destinée. EnÞn quoi, la société donc.
Une histoire quasiment vraie où les adultes sont loin de satisfaire eux-mêmes à ce qu'ils demandent aux jeunes générations ; où l'expérience et la maturité sont subtilement employées à (se) cacher défaites, compromissions et peurs ; où la tentative de rationaliser la peur devant celui qui est différent, donc dangereux, est ridicule et ne trompe que ceux qui le veulent bien.
Finalement, ce livre ne serait-il pas un peu trop subversif pour nos presque-grands qui nous prennent déjà pour de vieux cons ? Allez, le message de prévention passe comme une lettre à la poste (baisers, piscine ä no problem ; sang, sperme : danger), et vers la Þn la Þction reprend ses droits et notre héros en devient un vrai, ce qui a l'air de résoudre ses problèmes immédiats.
À mettre en toutes les mains, et aussi celles des adultes pour leur rappeler un peu la passion et l'entièreté de l'adolescence, quand le c¶ur et les tripes ont encore prise sur la raison et que vivre c'est palpiter.
La vie à reculons ; Gudule alias Anne Karali ; éd. Hachette, Le Livre de poche jeunesse.
Sylvie DUGEAY
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