FQRD Sondage BVA / Radio FG / Illico
Les français et l'homosexualité

Les grandes étapes politiques sont l'occasion de faire le point sur les mouvements de la société. Ainsi, avec l'institut BVA et Radio FG nous avons tenté de mieux connaître le regard des Français sur les gays : de la tolérance certes mais des réticences quant aux droits.

Je vais vous citer un certain nombre de phrases que l'on peut entendre a propos des homosexuels. Pour chacune d'elles, vous me direz si vous êtes tout à fait d'accord, plutôt d'accord, plutôt pas d'accord ou pas du tout d'accord.

Les homosexuels sont des individus comme les autres.

La société actuelle ne favorise pas l'intégration des homosexuels.

Un sondage à propos des gays : pour quoi faire ?
Bien sûr, en période d'élections, au moment où jour après jour tombent des sondages sur les intentions de vote des Français, on pourrait juger qu'une enquête, une de plus, c'est excessif voire malvenu. Pourtant, rares sont les sondages qui portent, comme celui que l'Institut BVA, Illico et Radio FG vous proposent de découvrir ici, sur les attitudes des Français à l'égard de l'homosexualité et des gays et lesbiennes. Mal connue, souvent objet de clichés, la communauté gay a tout intérêt à connaître les opinions et sentiments dont elle est l'objet. Elle peut ainsi intégrer ces paramètres tant dans la façon dont elle souhaite affirmer sa visibilité que dans les revendications qu'elle développe. De même, alors que se dérouleront bientôt les premiers "Etats généraux : Homosexualités et SIDA" en France, il est intéressant pour les politiques comme pour l'opinion publique de prendre une plus juste mesure de ce que pense "la France" des homosexuels et lesbiennes qui la composent au même titre que le reste de la population. De tableau en commentaire, chacun, gay ou non, peut mieux cerner les attitudes des Français en 1995 à propos de ce qui fut longtemps un tabou.

Tolérance confirmée à l'égard des gays en 1995
On note aujourd'hui une consolidation de l'attitude de tolérance à l'égard des gays puisque notre sondage révèle que 78 % des Français sont tout à fait (53 %) ou plutôt d'accord (25 %) avec l'idée que "les homosexuels sont des individus comme les autres". En mai 93 dans un sondage "Ifop-Globe hebdo", 70 % de la population considérait que l'homosexualité "était une manière comme une autre de vivre sa sexualité" mais selon cette même enquête, seuls 51 % des Français éprouvaient de la sympathie pour les homosexuels. La tolérance vis-à-vis des gays semble donc être régulière et fait nouveau porte non plus sur la seule sexualité comme dans le sondage "Ifop-Globe Hebdo" mais sur les homosexuels comme individus. Une évolution significative si on se rappelle qu'en 1986 seuls 54% des Français admettaient cette autre sexualité. Comme c'est souvent le cas pour toute question qui a trait aux moeurs on constate que la tolérance est plus forte chez les femmes (56,8 % contre 49,6 chez les hommes) et chez les jeunes. (69,6% chez les moins de 25 ans contre 33 % chez les 65 ans et +). Parallèlement à ce phénomène mais de façon moindre les Français reconnaissent à 63% (35% tout à fait d'accord et 28% plutôt d'accord) que la société actuelle ne favorise pas l'intégration des homosexuels. Un chiffre édifiant qui pointe bien les lacunes de la reconnaissance des gays dans un pays qui ne passe pourtant pas pour homophobe.

Les homosexuels ne benéficient pas aujourd'hui, dans leur vie de couple, des memes droits que les hétérosexuels. Parmi les droits suivants qui pourraient leur être accordés, seriez-vous tout à fait d'accord, plutôt, plutôt pas ou pas du tout d'accord pour qu'ils puissent en benéficier.

Les droits de succession entre partenaires de vie commune.

Le droit de s'unir civilement.

Le droit à l'adoption.

Le droit à la procréation artificielle.

Non pour l'adoption...
mais oui pour les
droits de succession
Si les Français font le constat que la société actuelle ne favorise pas l'intégration des homosexuels, ils restent pourtant très partagés quant aux applications pratiques de cette intégration. C'est dans le domaine des droits que les disparités sont les plus criantes. Ainsi 72 % des Français sont favorables au fait d'accorder aux homosexuels "le droit de succession entre partenaires de vie commune". Ils étaient 74% dans un sondage réalisé en 1991 par Ipsos, Gai Pied Hebdo et le Collectif du Contrat d'Union Civile. Ce qui marque là encore une bonne stabilité. Cependant, l'union civile pour les gays semble faire moins recette puisque le chiffre est passé de 72% d'opinion favorable en 1991 (Sondage Ipsos, GPH et Collectif du Cuc) à 50 % dans notre sondage. En 1995, 47% des Français (15% plutôt pas d'accord et 32% pas du tout d'accord) sont opposés à l'octroi aux gays du droit à s'unir civilement. En mai 92, un sondage Ipsos - GPH - Collectif Cuc révélait que 46 % des Français étaient d'accord avec le fait que "les concubins homosexuels devraient avoir les mêmes droits que les autres concubins". A propos de l'adoption par les couples gay et lesbiens, le verdict est sévère : c'est un refus pour 62% des Français. Là encore les hommes sont plus opposés que les femmes à cette mesure (64,3% contre 60,2%) et les personnes de 50 à 60 ans davantage que celle de 25 à 34 ans (72,8% contre 57,5%). Quant à la possibilité d'avoir accès à la procréation artificielle, c'est un désaccord quasi complet à 80% (78,1% des hommes y sont opposés et 80,9 des femmes).


La tolérance d'accord mais l'intimité non
Lorsque l'on interroge les Français sur des situations plus pragmatiques de la vie quotidienne qui pourraient les mettre en contact avec des homosexuels, la tolérance décroît quand le degré d'intimité augmente. 81 % des Français peuvent travailler facilement avec un homosexuel (les femmes très facilement à 56,4% et les hommes très facilement à 42,4%), 79 % iraient au restaurant mais on descend directement à 62 % lorsqu'il s'agit de partir en vacances. Lorsqu'il s'agit de confier la garde de ses enfants, de fortes réticences quasi égales se font sentir chez les hommes (38,1%) que chez les femmes (36,1%). Encore une fois, on constate que les Français sont plus réticents avec les gays dès lors qu'il s'agit de situations plus intimes, moins théoriques donc plus impliquantes. Par ailleurs, beaucoup de Français jugent seulement "plutôt facile" l'exercice de certaines relations sociales (travailler avec un gay : plutôt facile pour 31%, partir en vacances avec un gay plutôt facile pour 26%...), ce qui indique bien une certaine restriction...

Imaginons qu'une personne de votre entourage, parents, amis soit homosexuelle et que vous vous trouviez dans les situations suivantes avec elle. Pour chacune de ces situations, dites-moi si vous l'accepteriez très facilement, plutôt facilement, plutôt difficilement ou très difficilement.

Travailler avec cette personne.

Partir en vacances avec cette personne.

Aller au restaurant.

Lui confier la garde de vos enfants.


Feu vert pour la prévention du SIDA vers les gays
Concernant les campagnes de prévention contre le SIDA qui s'adresseraient directement aux homosexuels, 88 % des Français pensent qu'il est nécessaire d'en réaliser dans les médias homosexuels. En revanche, et là, le chiffre est fort intéressant, 85 % des personnes interrogées estiment nécessaire la présence de ces campagnes à la télévision, média touchant le plus grand nombre. Un choix que l'Etat s'est pourtant toujours refusé à faire au motif que cela pouvait heurter l'opinion publique dans son ensemble ou que le public n'était pas "prêt" pour ce type de campagne. Le chiffre d'aujourd'hui tend à affirmer le contraire. Suivent enfin, à 79 % la nécessité de prévention en direction des gays dans les journaux nationaux, et à 74 % sur des affiches dans la rue. Ces deux chiffres sont un peu plus faibles que les deux précédents mais peuvent tout de même être considérés comme encourageants.

Selon vous, est-il tout à fait, plutôt, plutôt pas ou pas du tout nécessaire de réaliser des campagnes de prévention contre le sida qui s'adressent directement aux homosexuels ?

À la TV.

Sur des affiches dans la rue.

Dans les journaux nationaux.

Dans les médias homosexuels.


L'homosexualité n'est pas un handicap présidentiel
Enfin, une petite question subsidiaire en cette période de sondages électoraux et à quelques jours des prochaines élections présidentielles. A la question "Si demain vous appreniez que le candidat pour lequel vous aviez décidé de voter à l'élection présidentielle a eu des relations homosexuelles, quelle serait votre réaction ?" 71 % des interrogés ont déclaré qu'ils continueraient à voter pour lui. Le chiffre paraît de prime abord intéressant mais tout est relatif. Le revers de la médaille, c'est que 14 % des interrogés changeraient leur vote et 12 % hésitent. Dans un sens, les 26 % qui pèsent dans l'autre plateau représentent une personne sur quatre qui changerait ou remettrait en cause son vote. Ce chiffre est loin d'être enthousiasmant puisqu'en dépit de tout autre paramètre de choix, l'homosexualité seule serait aux yeux de certains électeurs un critère disqualifiant.

Si demain vous appreniez que le candidat pour lequel vous aviez decidé de voter à l'election présidentielle a eu des relations homosexuelles, quelle serait votre réaction ?


À la demande de Radio FG et du magazine Illico, l'Institut BVA a réalisé une enquête téléphonique auprès d'un échantillon représentatif de la population agée de 15 ans et plus.

1002 personnes ont été interrogées les 24 et 25 février 1995. Échantillon construit selon la méthode des quotas : sexe, age, profession du chef de famille, catégorie d'agglomération, région.

Sondage Copyright BVA, Groupe Illico, FG98.2 (C) Avril 1995
Textes et graphiques Copyright Groupe Illico (C) Avril 1995
Copyright Gais et Lesbiennes Branchés, (C) 1995

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