Message de AIDES,

à l'occasion de la Gay Pride de Paris, 23 juin 2001.

20 ans d'épidémie, 20 ans de combats.

Ces combats, nous les avons menés contre le Sida au sein de la communauté gay et aussi plus largement pour que les gays aient le droit de vivre comme tout le monde, c'est à dire en étant reconnus comme tels, et comme des personnes disposant des mêmes droits que nos concitoyens dont la sexualité s'exprime différemment.

Certains de ces combats ont été menés et gagnés parce que le milieu associatif dédié à la lutte contre le Sida a su faire front commun, et aussi parce que nous avons su unir nos forces avec celles engagées par les gays eux-mêmes pour la reconnaissance de l'identité gaie, de nos modes de vie, et de nos droits.

Nous avons gagné pour nous même un espace de reconnaissance indiscutablement plus ouvert que celui de la décennie précédente. C'est un espace précieux. Chaque parcelle de terrain conquis sur l'ignorance et la bêtise est un degré de moins dans l'exclusion dont on sait qu'elle a pour conséquence le repli sur soi, le mépris de soi, et parfois la destruction de soi.

C'est parce que nous avons toujours pensé que l'on ne peut avoir le souci de soi, de sa protection, de la préservation de santé, si la reconnaissance sociale des personnes concernées est absente que nous avons mené toutes ces luttes autour de l'identité gaie.

C'est parce que nous avons cette conviction que la non-discrimination contribue au renforcement des capacités des personnes à se battre, à affirmer leur identité, à prendre en charge leur santé, que nous luttons ensemble.

La bataille pour le PACS aura été de ces moments exemplaires où ensemble, associations de lutte contre le Sida et associations de la communauté gaie, nous avons pu conquérir, au moins partiellement, le droit à nous unir comme tout le monde.

Ce succès, vous le savez, s'est fait dans un contexte où la violence verbale à l'encontre des gays s'est déchaînée, confirmant pour nous la nécessité de nous battre aussi pour que ces propos homophobes soient condamnés.

C'est donc encore ensemble que nous menons le combat contre l'homophobie, cette intolérance qui génère le désespoir chez des adolescents doutant de leur orientation sexuelle et qui à entendre ces propos mettent fin à leurs jours. L'homophobie ce sont ces propos de haine ordinaire qui à force d'être répétés, entretenus, cautionnés, donnent à certains le sentiment de l'impunité qui les conduit à attenter à la vie des gays, à les assassiner parfois.

C'est pourquoi, avec Act Up, avec le Centre Gai et Lesbien, avec Pro-Choix, avec SOS Homophobie, et avec la Ligue des droits de l'Homme, nous avons lancé une initiative pour une stratégie contre l'homophobie.

Qu'affirmons-nous ?

Deux choses essentiellement :

que la loi doit pénaliser les propos homophobes pour que les violences verbales dont les gays sont l'objet soient sanctionnées,

et qu'une politique publique de lutte contre l'homophobie doit être mise en oeuvre.

Je voudrais profiter de ce moment pour vous dire combien nous espérons être nombreux à nous battre sur ce front, unis et fortement mobilisés pour continuer le combat contre l'ignorance et la bêtise, pour la pleine reconnaissance de l'identité gaie.

Je veux vous inviter à des fêtes politiques, à des combats politiques, à des initiatives politiques, à une quotidienneté politique, car nous sommes à AIDES convaincus que la santé publique ne se tronçonne pas en morceaux, qu'elle est un tout aux confins de la prévention, du soin, et de la reconnaissance des droits, bref ... que la santé publique est politique.

A la veille d'enjeux électoraux majeurs, la communauté gaie autant que ceux qui sont engagés dans la lutte contre le sida ont un devoir : être ensemble plus politiques que jamais.