Paris, le 23 juin 2000

À l'intention de Monsieur René Lalement,
Porte-parole du Conseil de la Lesbian and Gay Pride

Cher-e-s ami-e-s,

Bien du chemin a été parcouru depuis la marche de l'Europride en 1997, à laquelle j'avais eu le plaisir de participer. Le vote du pacs en cette fin d'année 1999 figure en particulier parmi les grandes avancées de la majorité plurielle. Pour avoir pris ma part à ce long débat amorcé en 1991, la ministre et la militante que je suis ne peut qu'apprécier cet aboutissement heureux d'un débat que nous aurions sans doute préféré moins passionné et plus apaisé. Les Verts, et notamment leurs députés, resteront toutefois vigilants sur les évolutions du pacs, notamment dans ses aspects fiscaux - nous en reparlerons lors de l'examen du budget à la rentrée - mais aussi sur la protection que ce nouveau statut doit accorder aux couples binationaux.

D'autres chantiers restent également à explorer. Au nom du gouvernement, Martine Aubry présentera à la rentrée le projet de loi de modernisation sociale qui comprendra, entre autres, de réelles avancées en matière de lutte contre la discrimination, y compris sur la discrimination homophobe. Bien des dispositions de ce texte figuraient d'ailleurs dans la proposition de loi déposée il y a deux mois par les députés verts. Je sais par ailleurs qu'ils préparent aujourd'hui des amendements pour une définition plus claire et moins ambiguë de l'aménagement de la charge de la preuve, pour une meilleure protection des plaignants d'éventuelles pressions de la part de l'employeur au cours d'une procédure et pour définir le harcèlement et les brimades sur le lieu de travail. Ce projet de loi est en effet prévu pour rendre notre droit du travail exemplaire sur le terrain de la lutte contre la discrimination : donnons-lui donc le maximum de chances d'y parvenir !

Il serait cependant dommage de s'arrêter en si bon chemin ! Ne laissons pas accréditer l'idée que ce projet de loi aurait vocation à masquer l'embarras du gouvernement sur une réforme globale et homogène de l'ensemble de notre droit, y compris dans ses volets pénaux. Il est urgent de mettre sur pied une réforme qui englobe notamment la loi sur la presse, au moment ou l'on observe une persistance des propos à caractère homophobe et lesbophobe, que personne ne tolérerait s'ils avaient une dimension raciste. Ne rien faire serait une incitation à plus de déchaînement haineux encore, et cela n'est pas acceptable. La tâche est rude, et bien des réticences restent à être levées. C'est bien le rôle de vos associations que de créer un véritable mouvement de société pour vaincre les derniers obstacles.

Pour terminer, même si je n'ai pas besoin de vous le dire pour que vous vous amusiez, je vous souhaite de joyeuses festivités, et une longue nuit à l'image de cette marche : festive, bruyante, colorée, et pleine de rencontres !

Dominique Voynet