Représentants de l'APGL, Association des Parents et futurs Parents Gays et Lesbiens, nous allons Martine Gross et moi-même, parler au nom des 1000 adhérents de notre association.
Le Pacs est voté. Nous sommes ravis que cette première étape soit franchie
Et nous rendons hommage au travail de tous les militants - au premier rang desquels ceux du Collectif pour le Pacs - qui ont rendu possible ce grand événement. Sachons savourer cette victoire qui appartient aussi à vous tous.
Mais le combat continue. L'homophobie, ce fléau social reste présente. Cette homophobie revêt de nombreux visages.
Certes c'est celle des insultes dans la rue, celle des discriminations au travail, celle des moqueries au quotidien, ou celle des violences verbales et hélas parfois physiques
Mais c'est celle aussi de la non reconnaissance sociale, et du non-droit.
Et dans ce domaine du social et du juridique, le lieu où cette homophobie s'exerce le plus fortement aujourd'hui , c'est celui de la famille.
Alors même que les familles homoparentales existent, alors que des dizaines de milliers de gays et de lesbiennes sont déjà parents et que des centaines de milliers de gays et de lesbiennes désirent devenir parents, de flagrantes discriminations existent encore :
Quelques exemples parmi d'autres :
- que ce soit en termes de jurisprudence :
- certains d'entre nous, homosexuels, sont quasiment empêchés d'exercer leurs responsabilités vis-à-vis de leurs enfants après un divorce
- quelqu'un qui ne cache pas son homosexualité n'a pratiquement aucune chance d'adopter un enfant
- ou en termes de droit positif
- les couples de même sexe sont exclus des techniques de procréation médicalement assistées
- les couples de même sexe sont exclus des procédures d'adoption.
- les couples de même sexe sont exclus de l'institution du mariage.
Toutes ces discriminations existent aujourd'hui alors même que chacun semble d'accord pour reconnaître que la famille est plurielle et ne s'écrit plus avec un grand F.
Dans la réalité de tous les jours coexistent des familles, qu'elles soient adoptives, recomposées, Groseille ou Le Quesnoy, traditionnelles ou alternatives.
Alors, la famille serait-elle le seul lieu qui doive évoluer en excluant les personnes homosexuelles?
Serions nous des citoyens acceptables tant que nous sommes loin des enfants?
Un nouvel exemple de l'homophobie concernant la famille date d'il y a un mois : nous venons de voir éclore une nouvelle espèce de champignon vénéneux, une sorte d'amanite homophobe :
une pétition signée par 170 députés et sénateurs, qui vise à interdire à deux personnes de même sexe unies par un pacs, d'adopter un enfant.
Cela ne ressemble-t-il pas furieusement à un cordon sanitaire pour enrayer une maladie, une maladie dont les symptômes seraient le désir des gays et des lesbiennes de s'engager auprès d'enfants et de devenir parents.
Allons nous, allez vous, accepter d'être traités comme des agents pathogènes pour notre société?
Nous ne pouvons imaginer que les gays et les lesbiennes se laissent faire.
Nous en appelons à toutes les consciences, à toutes les énergies pour réagir.
Nous sommes tous concernés par cette forme d'homophobie.
Nous n'admettrons pas que nous soient déniées des compétences de parents sur le seul critère de notre orientation sexuelle.
Rien n'a jamais prouvé que des personnes homosexuelles seraient traumatisantes pour des enfants.
Nous ne demandons pas un droit à l'enfant. Nous sommes favorables,
selon le puissant principe de non-discrimination, à l'égal accès de tous
les citoyens à toute forme d'institution sociale ou juridique, en termes
de couple et de filiation. Nous sommes en tant que parents et futurs
parents extrêmement sensibles à l'intérêt de l'enfant. C'est
pourquoi, nous disons que
- les liens des enfants avec les adultes qui les
élèvent doivent être protégés, quel que soit le sexe et l'orientation
sexuelle de ces adultes ;
- un enfant doit pouvoir s'inscrire dans une
filiation cohérente avec son environnement parental. L'établissement
d'une filiation est un acte culturel, synonyme d'engagement
irrévocable et de sécurité pour les enfants.
Envisager d'élever des enfants ou choisir de ne pas le faire, il
s'agit là d'une liberté individuelle fondamentale. Ne pas
permettre à des citoyens de le faire relève de l'homophobie.
Construisons une société où il n'y a pas de citoyens moins égaux
que d'autres, et où les liens que les enfants tissent avec leurs
parents soient garantis. Chacun doit pouvoir choisir son dessin.
Merci de votre attention.
Eric Dubreuil et Martine Gross